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Une démocratie décidément bien malade…

Dimanche 18 et lundi 19 juin 2017

 

Sujets traités :

  1. Campagne de 2nd tour, morne plaine
  2. La « chambre introuvable » : quelle légitimité ?
  3. C’est moins pire que si c’était pire

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  1. Campagne de 2nd tour, morne plaine

Avant 2002, autrement dit avant que Lionel Jospin n’ait cette brillante idée d’inverser le calendrier, autrement dit, et afin que le pays ne connaisse plus de cohabitation, que les législatives suivent la présidentielle et que le rythme de 5 ans soit commun aux mandats de président et de député, on avait des campagnes agitées, l’élection législative devenant, de fait, une élection cruciale puisque le président en place pouvait se trouver désavoué. Il est clair aujourd’hui que ces temps-là sont révolus. Pour nombre de français, le parlement n’est rien d’autre qu’une chambre d’enregistrement et l’affaire est jouée avant même d’avoir été engagée. Aucun débat, tout juste ici et là un choix biaisé dont chacun pressent qu’il n’aura aucune incidence quant au résultat final. Les médias ont tout fait pour installer cet état de choses dans les esprits. N’ayant de cesse de tresser des couronnes au nouveau président, et alors que le « dégagisme » avait éliminé les deux partis traditionnels, PS et LR, on eut pu penser que le fait qu’Emmanuel Macron ait été élu de par un « alignement des planètes » qui ne tenait en rien à son programme, les législatives eussent pu, pour un fois, être un lieu de débat politique. Las, il n’en fut point. Chaque électeur fut renvoyé à sa circonscription, les élections législatives ravalées au rang de scrutin local telles les défuntes départementales. Élection en apparence sans enjeu, les instituts de sondages n’ayant de cesse de démontrer que l’affaire était pliée d’avance. Fort de cette conviction, plus de la moitié des électeurs trouva mieux à faire que d’aller voter le 11 juin. Cette abstention massive ne toucha toutefois pas les catégories sociales de la même façon. En Seine-Saint Denis, par exemple, parangon de pauvreté s’il en est, seuls 38,4 ! % des inscrits s’exprimèrent tandis que ce taux monta à 53,5 % dans les Hauts-de-Seine ou 56 % à Paris, départements dont la pauvreté de la population n’est pas le trait dominant… Des enquêtes d’opinion montrent en outre que l’abstention est inversement proportionnelle au CSP. Bref, pour le dire en des termes aujourd’hui désuets, ce fut un « vote de classe ».

 

Quant, donc, arrive la campagne de 2nd tour, l’électeur aurait pu s’attendre à ce que les appels à la mobilisation trouvassent quelque écho. Nationalement, point ! Tout juste eut-on droit, ici et là, à des débats organisés sur le mode local. À la décharge de France 3 ou de la PQR, il faut bien reconnaître que leurs tentatives d’organiser quelque débat que ce soit se virent poliment déclinées par la très grande majorité des candidats macronistes. Quelques uns toutefois y consentirent et tant l’auditeur ou le téléspectateur que les journalistes ne furent alors pas déçus. Ainsi France 3 Pays de la Loire eut-il la bonne idée d’inviter sur son plateau Fabienne Colboc, la candidate de LREM. Ce fut un grand moment de l’interview politique. Si vous avez envie d’y goûter, c’est ici. On eut aussi droit à celle-là : une certaine Anissa Khedder, candidate LREM dans la 7ème circonscription du Rhône (Bron, Rillieux, Vaulx-en-Velin, Sathonay). Enfin, et toujours pour apprécier à sa juste valeur les fruits du « dégagisme macronien », cette explication de Marie Sara Lambert, la torera opposée à Gilbert Collard dans le Gard, sur le plateau de l’Émission politique de France 2. C’est peu dire que tout ceci est affligeant et même si l’on peut penser que l’ensemble des candidats de LREM n’est pas de cet acabit, on comprend sans peine que ce « renouveau » politique est pour une bonne part une mascarade.

 

 

Quelques commentateurs, dont Edwy Plenel, ont crû bon d’affirmer « qu’un âne aurait été élu pour peu qu’il portât l’étiquette En Marche ! » et d’autres firent le même constat en recourant aux chèvres. Force est de constater au vu de ce qui précède qu’il va s’en trouver en nombre dans la nouvelle Assemblée nationale au soir de ce 18 juin. À noter que tous ces candidats qu’on aime tant à nous présenter comme tous neufs ne le sont pas forcément. Des citoyens facétieux ont exhumés le nom de quelques inconnus qui n’en sont pas à leur coup d’essai. Seule différence, ainsi qu’on le voit trop bien les concernant, ils ont eu l’habilité de se faire étiqueter LREM cette fois-ci. Avec succès wink

 

 

Faute de débat, donc, et on comprend bien pourquoi les candidats de LREM et leurs supporters médiatiques firent tout pour qu’il en allât ainsi, on se focalisa sur François Bayrou. Ce « poids lourd » du gouvernement Macron, Garde des Sceaux dans le 1er gouvernement d’Edouard Philippe, est en effet rattrapé par un fort soupçon d’emplois fictifs. Cette affaire est, rappelons-le, de même nature que ce qui est reproché à un certain nombre d’élus FN au parlement européen. Qu’elle sorte maintenant - sauf à être d’une naïveté quelque peu confondante et pour tout dire coupable car confinant de trop près avec la bêtise - ne peut être le fruit d’un heureux hasard. En sorte que la question qui est posée est davantage politique que judiciaire. Sur le plan judiciaire, il est fort possible que la faute soit avérée, autrement dit que le MoDem ait fait comme tant d’autres, à savoir se servir des généreux moyens attribués à ses parlementaires européens à d’autres fins que l’activité au parlement. On peut, certes, y trouver à redire sur le plan légal puisque c’est en contravention avec le règlement de Strasbourg mais tout ça n’est ni nouveau ni parfaitement scandaleux. Les partis politiques ont besoin pour vivre, c’est-à-dire pour être un minimum efficace, de militants à temps plein. Les largesses européennes sont telles qu’il est fort à parier que peu s’en privent… La seule règle étant, comme toujours, de ne pas se faire prendre. Quant à comparer avec le Penelopegate, c’est un abus journalistique car nul ne doute que ces militants, qu’ils fussent FN ou MoDem, travaillent à temps plein pour leur parti quand peu doutent que Penelope n’ait jamais fait quoi que ce soit…

 

Si, donc, cette affaire sort maintenant, on peut penser que ce n’est pas là le seul effet du hasard, tout comme on peut avoir quelque doute quant à la coïncidence de la sortie de l’affaire Penelope avec l’élection présidentielle. Et, donc, par delà les incantations vertueuses des uns et des autres, par delà la maladroite et intervention de François Bayrou à l’endroit d’un journaliste de France inter, on peut penser qu’Emmanuel Macron et ses amis sont en train de se débarrasser du MoDem et qu’ils le feront d’autant plus facilement qu’ils pourront se passer de ses députés. Avec l’élection d’un grand nombre de LR « macron-compatible », ça n’en sera que d’autant plus facile. Le 1er ministre est déjà à la manœuvre, s’y prépare et, au nom d’une clarification politique réputée indispensable et à défaut d’avoir la majorité du groupe LR, il est prévu de faire un groupe parlementaire ad-hoc avec eux. Si l’opération se fait, de surcroît en sciant la branche du détesté François Bayrou, il va de soi que ce n’est pas ce qui les réjouira le moins… On notera qu’une quinzaine de candidats En Marche ! ont de bruyantes casseroles attachées à leur basques sans que la presse n’ait jamais daigné s’y intéresser. Le traitement de faveur accordé aux « marcheurs » n’est sans doute, là aussi, pas totalement le fruit du hasard…

  1. La « chambre introuvable » : quelle légitimité ?

Le plus terrifiant dans l’affaire n’est pas tant le sort qui guette François Bayrou que le nombre de députés qui seront favorables à ce président. Outre les députés LREM stricto-sensu, il convient en effet d’y ajouter les députés MoDem qui ne trouveront de toute façon rien à redire à la politique menée, les députés LR « macron-compatibles » organisés par et autour d’Edouard Philippe et les députés PS-MRG-divers gauche de type Le Foll, Valls, El Khomri ou Touraine, etc. tout autant compatibles que les précédents et dont l’élection n’a tenu qu’à l’absence de candidat LREM face à eux. Mieux que la « chambre introuvable » de Louis XVIII, mieux que la chambre « bleu horizon » de 1919 avec François de Wendel, Pierre Taittinger, Maurice Barrès et Louis Georges Rothschild, entre autres, c’est donc à une majorité à la chambre jamais vue jusqu’alors dans ce pays qu’on se prépare. Dans nul autre pays au monde ne se trouve un chef d’État qui, fort du vote de 18 % des inscrits, se retrouve avec plus de 80 % des députés. On se gausse beaucoup de la Russie, des tendances dictatoriales de son président actuel, Vladimir Poutine. Soit. Mais qui sait que ce pays vote à la proportionnelle intégrale et qu’à la Douma, l’équivalent russe de notre assemblée nationale, Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, n’a pas la majorité absolue des sièges et avec son allié Russie Juste n’a même pas la majorité qualifiée des 2/3 ? C’est dire à quel point les résultats qui vont être obtenus en ce dimanche soir sont surréalistes et proches de ce qui se fait de pire.

 

 

D’une certaine façon, chacun sent bien que c’est décidément trop, que cette Vème République et ce système électoral sortent notre pays du champ démocratique. On ne résistera pas ici à citer « Jupiter », Emmanuel Macron, qui, le 28 février 2017 à Angers a déclaré : « Est-ce que quelqu’un peut penser raisonnablement, qu’élu Président, il aura une majorité présidentielle uniquement avec son parti ? Moi, je n’y crois pas. Et non seulement ce n’est pas possible mais ce n’est pas souhaitable parce que ce serait un hold-up ! »

 

Oui, sans aucun doute, c’est bien un « hold-up » auquel on vient d’assister, les soubresauts d’une démocratie malade, d’un système à bout au service d’une oligarchie qui ne prend plus de gants, qui tient la presse, qui envisage, grâce à l’inscription dans la loi ordinaire des mesures extraordinaires de l’État d’urgence, de limiter drastiquement les libertés et d’emprisonner tout ce qui osera encore bouger. Mais, comme le dit fort bien Frédéric Lordon, « Il n’est pas certain que le macronisme triomphant réalise bien la victoire à la Pyrrhus qui lui est échue. C’est que jusqu’ici, l’indifférenciation patentée des partis de gouvernement censément de bords opposés parvenait encore vaille que vaille à s’abriter avec succès derrière l’illusion nominale des étiquettes de « l’alternance ». Evidemment, l’alternance n’alternait rien du tout, mais il restait suffisamment d’éditorialistes abrutis pour certifier que la « gauche » succédait à la « droite, ou l’inverse, et suffisamment de monde, à des degrés variés de cécité volontaire, pour y croire. Le problème du macronisme, c’est précisément… qu’il a réussi : sa disqualification des termes de l’alternance prive le système de son dernier degré de liberté, assurément factice mais encore doté de quelque efficacité résiduelle. Quand il aura bien mis en œuvre son programme, poussé tous les feux, par conséquent rendu folle de rage une fraction encore plus grande de la population, où trouvera-t-il son faux alternandum et vrai semblable, l’entité faussement opposée et parfaitement jumelle qui, dans le régime antérieur, avait pour double fonction de soulager momentanément la colère par un simulacre de changement tout en assurant la continuité, quoique sous une étiquette différente ? »

 

Pour lire l’intégralité de l’article de Frédéric Lordon, c’est ici.

 

En d’autres termes, le roi est nu ! La fausse alternance organisée depuis des lustres dans ce pays avait le grand mérite de permettre de conduire, peu ou prou, la même politique avec deux équipes en concurrence mais d’accord sur l’essentiel de sorte que le citoyen pouvait penser qu’il y avait alternance, qu’il avait le choix. François Hollande a fait la démonstration en actes durant cinq ans que cette alternance était factice. Emmanuel Macron en a pris acte et a organisé, sur cette base, le « parti unique », celui qui va occuper dès demain plus de 80 % des sièges à l’Assemblée nationale. Le danger, certains en sont conscients, à commencer par le fan-club d’Emmanuel Macron, c’est que le paravent ne trompe plus personne. Une large partie de la jeunesse fait déjà sécession à la présidentielle. Elle a, pour une part, voté Mélenchon au 1er tour, pour ensuite renoncer à participer. Les ouvriers, les employés de ce pays ont lâché l’affaire depuis un bon moment déjà. La preuve de tout cela nous est donnée par le très grand nombre d’abstentionniste au 2nd tour de la présidentielle et à leur nombre encore plus grand encore aux deux tours de ces élections législatives. Rien ne dit que cette sécession se transformera en un mouvement de transformation sociale demain. Mais rien ne dit le contraire. Ce pays étant ce qu’il est, tant qu’il en est encore temps, certains puissants feraient bien se savourer leur triomphe d’un soir…

 

 

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  1. C’est moins pire que si c’était pire

Les lignes qui précèdent ayant été écrites avant de connaître les résultats, il convient comme la semaine passée de les commenter en ce lundi matin post-2nd tour.

 

1. D’abord, bien sûr, alors que les électeurs étaient invités à s’exprimer dans 573 des 577 circonscriptions, ce qui frappe c’est le record atteint par l’abstention et les votes blancs et nuls puisque, finalement, les suffrages exprimés ne représentent que 38,4 % des inscrits. Et encore, fait-on ici l’impasse sur plus de 9 millions de français en âge de voter qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales…

 

Source : ministère de l’intérieur

 

Ce constat invalide d’emblée toute représentativité à cette assemblée qui ne sera, de fait, que l’expression d’un suffrage censitaire digne du XIXe siècle.

 

2. Dans le contexte général décrit ci-dessus, s’agissant de ceux qui se sont exprimés, il y a manifestement eu ce dimanche un léger rééquilibrage au regard de ce qu’annonçaient les instituts de sondage. À noter, au passage, qu’aucun mea-culpa ne viendra d’eux durant la soirée électorale et que nulle voix discordante ne viendra leur demander le moindre compte…

 

Ainsi, le Front national disposera-t-il de 8 sièges à l’Assemblée ce qui, au regard du nombre de suffrages qu’il a recueilli est évidemment un total déni de démocratie. Il ne pourra constituer un groupe parlementaire ce qui signifie que ses députés seront privés de tout moyen d’intervention réelle au parlement. Il peut certes se féliciter d’y voir entrer sa patronne, Marine Le Pen, au parlement (qui a été largement élue dans sa circonscription d’Hénin-Beaumont) ce dont elle ne manquera pas de se servir sur le terrain médiatique mais il est clair, au lendemain de cette année électorale que le FN n’a pas atteint ses objectifs même si, ainsi que le fait remarquer MLP, le « plafond de verre » a en partie cédé puisque, contrairement aux deux élus de la précédente assemblée ne devant leur siège qu’à des triangulaires, les 8 élus de cette assemblée l’auront été dans le cadre de duels. À noter que l’une des « chèvres » ci-dessus épinglée a fait les frais de cette affaire puisque Gilbert Collard a réussi de très peu à se faire élire à son détriment. Dans la série des « célébrités » du FN, la défaite de Florian Fillipot, n°2 du FN et en partie désigné comme responsable de la défaite de la présidentielle par les « amis » de la blonde nièce. Gageons qu’il ne manquera pas de faire valoir que sa ligne politique est à l’origine de la victoire de cinq élus FN dans le Pas-de-Calais, dont MLP elle-même et que, manifestement, la Moselle n’est pas le Pas-de-Calais puisque tous les candidats FN y ont été battus ce dimanche. Pas sûr que cet argument suffise à contenir l’offensive que certains entendent mener contre lui et sa ligne politique « ouvriériste et anti-européenne » réputée être la cause de l’impossibilité de passer des accords avec une droite LR de type Laurent Wauquiez qui partage avec le FN une vision identitaire grand teint.

 

3. Du côté de LR, par delà les espoirs douchés au soir de la séquence présidentielle et les 113 députés qui feraient de LR la première force d’opposition, ce qui est en jeu c’est l’unité de ce parti. C’est le 4 juillet à l’occasion du vote de confiance qu’Edouard Philippe demandera au parlement que l’on verra qui la lui accorde et qui la lui refuse. Ce sera là la ligne de fracture nette entre les « macron-compatibles » et ceux qui avec Eric Ciotti et Laurent Wauquiez entendent se situer dans une opposition frontale et systématique à Emmanuel Macron. Il est fort à parier que le groupe LR explose à cette occasion et on sait d’ores et déjà qu’Edouard Philippe entend constituer un groupe distinct avec ses supporters. Dans un tel contexte, l’UDI avec ses 17 députés aura à choisir entre la constitution d’un groupe autonome ou l’intégration à ce groupe d’élus « conciliants ». En tout état de cause, sur des questions aussi importantes que la loi travail, tout ce petit monde votera les ordonnances et fera même probablement de la surenchère pour aller encore plus loin dans la mise à bas des garanties sociales.

 

À noter que celle qui entendait rien moins que supprimer le statut de la Fonction publique et que la presse s’est toujours complu à nous présenter comme une modérée, NKM, a été battue dans la circonscription réputée imperdable de François Fillon à Paris. Quant à l’agression dont elle prétend avoir été victime et qui l’a conduite à l’hôpital la semaine passée, la damoiselle est bien fragile. Toutes les images montrent que son « agresseur » s’est simplement contenté de lui mettre sous le nez un de ses tracts avec quelques paroles bien senties et que notre polytechnicienne qui aime tant rappeler qu’elle sort d’une école militaire a réagi à cela en se donnant elle-même le coup qui l’a fait chuter. On se doutait bien que le recrutement à Polytechnique avait peu à voir avec les qualités physiques des candidats et tout à voir avec les performances en Mathématiques et Physique. Cet incident le confirme avec éclat. Marie-Chantal est bien émotive et bien peu préparée physiquement et émotionnellement. Son agresseur a néanmoins été mis en garde à vue. Il est maire d’une petite commune de 56 habitants et est réputé être de droite ce qui ridiculise ceux et celles qui telle Myriam El Khomri ont crû bon de se saisir de cet incident pour expliquer qu’il fallait y voir la main de Jean-Luc Mélenchon. Quelle indignité ! (voir ici)

 

Parmi les élus du centre, on se félicitera de l’élection de ce personnage truculent à défaut d’être clair, ce béarnais revendiqué qu’est Jean Lassalle. L’indépendance d’esprit dont il témoigne, sa volonté de défendre une certaine ruralité, son humanité font que, quoique d’un bord opposé, son élection puisse paraître être une très bonne chose. Notons sa « remontada béarnaise » tout à fait remarquable puisqu’il est passé de 17,7 % des voix au 1er tour à 52,8 % au 2nd tour face à un adversaire LREM !

 

4. Du côté du PS, la situation ressemble à celle de LR, en pire, en ce que nombre de ceux qui se sont fait élire ce dimanche sont, pour une part, « macron-compatibles » et ne doivent leur élection qu’à la mansuétude d’Emmanuel Macron qui a refusé de leur opposer un candidat. C’est le cas de l’ancien ministre de l’agriculture et porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, dans la 4ème circonscription de la Sarthe ou, semble-t-il, de Manuel Valls dans la 1ère circonscription de l’Essonne. En sorte que, non seulement une partie des élus PS ne doivent en fait leur élection qu’à la seule mansuétude de Jupiter mais qu’en outre ne siégeront au Palais Bourbon qu’une trentaine de députés étiquetés PS. Autant dire qu’avec un tel résultat, le PS est mort et que la démission du poste de 1er secrétaire de « Camba » ne servira pas à colmater les brèches et à combler le trou financier que cela induit. On mesure là toute la pertinence du tweet ironique de François Lamy « Dans cette soirée de Berezina pour la gauche, un grand merci à François Hollande et Manuel Valls».

 

Dans ce paysage dévasté, quelques satisfactions : Myriam El Khomri, Marisol Touraine et Najat Vallaud-Belkacem ont perdu leur match de second tour. On ne les pleurera pas… On regrettera bien sûr que Manuel Valls ait apparemment sauvé son siège avec 139 voix de plus que son adversaire LFI, Farida Amrani. Le fait que les résultats des quatre bureaux de vote dans lesquels LFI n’avait pas d’assesseur soient arrivés en dernier et plus tardivement que tous les autres dans lesquels la candidate LFI était en tête rend extrêmement suspects les résultats enregistrés dans ceux-ci et, par conséquent, le résultat final transmis en préfecture. La candidate des Insoumis a demandé un recomptage des bulletins mais celui-ci ne lui pas été accordé et les bulletins sont réputés être détruits sitôt les PV établis, ce que n’ignorent nullement Manuel Valls et ses amis. Connaissant la carrière politique et l’absence de scrupule dont elle témoigne de sa part, on ne peut être que dubitatif sur ce résultat. Autre chose sera d’étayer un recours en annulation. Les cyniques ne manqueront pas de souligner ici qu’avec un tel adversaire, c’est être d’une coupable naïveté que de n’avoir pas prévu des assesseurs dans tous les bureaux de vote de la circonscription. On ne manquera pas de suivre attentivement le devenir du recours déposé par la candidate et on regrettera que la procédure électorale ne permette pas dans des cas aussi serrés de recompter les suffrages.

 

5. Comment ne pas se satisfaire de ce que LFI ait déjoué les pronostics de tous ces « observateurs » et puisse constituer un groupe à l’Assemblée ? Comment ne pas apprécier la « remontada picarde » de François Ruffin, notre Michael Moore national, l’arrivée au parlement des ténors de LFI tels Alexis Corbières, Éric Coquerel, Clémentine Autain et, bien sûr, Jean-Luc Mélenchon lui-même qui a « écrasé le match » dans la 4ème circonscription de Marseille avec près de 60 % des voix. On se réjouira aussi de l’élection de Marie-George Buffet et André Chassaigne au titre du PCF qui sauront sans nul doute, eux aussi, s’opposer au pouvoir macroniste. Autre chose est que ces élus du PCF intègrent le groupe parlementaire LFI. Les relations tendues entre Jean-Luc Mélenchon et le 1er cercle de LFI avec la direction du PCF dont André Chassaigne et Pierre Laurent sont les figures emblématiques font que l’on peut penser que le PCF désirera garder son autonomie dès lors qu’il trouvera quelques élus isolés consentant à constituer un groupe parlementaire avec eux. Ce ne sera pas la première fois puisque c’était déjà le cas durant la précédente législature. Ce type de groupe n’impose à ses membres aucune discipline de vote, la seule condition est de consentir à partager les moyens attribués au groupe. C’est évidemment beaucoup moins contraignant que de s’intégrer au groupe LFI et de signer la charte de ses élus… Cette position préserve en outre la capacité d’expression de la direction du PCF qui ne dispose plus de beaucoup d’autres moyens. La présence au parlement de Jean-Luc Mélenchon lui-même, ses interventions tonitruantes qui ne manqueront pas d’être remarquées ont toutes les chances d’être jugées comme risquant de porter atteinte à l’expression autonome de ce parti vieillissant qu’est le PCF, parti qui ne désespère manifestement pas de passer des petits accords, électoraux entre autres, avec une partie du PS moribond.

 

6. Que dire, enfin, de la majorité absolue de LREM, des macronistes, qui, à eux seuls ont la majorité absolue au parlement. Comment ne pas souligner ici, une fois encore, le hiatus évident entre le nombre de voix obtenues par ce parti politique – 11,8 % des inscrits – et leurs 308 sièges (53,4 % des sièges) ?

 

Alors, bien sûr, les « optimistes de service » ne manquent pas de faire valoir que « c’est la dure loi du sport ». Autrement dit que les autres font encore moins. C’est vrai mais là n’est pas la question. La question est de savoir si on peut encore parler de démocratie parlementaire avec un système électoral pareil. Comment se satisfaire de ce que le parlement censé être le lieu du contrôle de l’action de l’exécutif et le reflet de la volonté populaire soit à ce point déconnecté de la réalité du pays. L’opération LREM va, certes, conduire à une renouvellement considérable du parlement, à son rajeunissement (48,6 ans), à sa féminisation (38,6 %). Toutes choses dont on peut certes se réjouir mais quid de sa composition sociale. Comment penser que cette armada de cadres sup, d’anciens élèves de HEC et de Science Po’ puisse avoir la moindre idée de la vie de l’immense majorité de la population dont ils ignorent tout des difficultés. Par bien des aspects, cette chambre « introuvable » est une copie de ce que le pays a connu sous la IIIème République, celle de cette bourgeoisie triomphante que dépeignaient avec brio Flaubert et quelques autres. Ils semblent « modernes » en ce que la place qu’ils occupent dans la société a tout pour les satisfaire, eux, leur petite famille aisée, leurs enfants qui réussissent si bien à l’école, eux qui se sentent « citoyens du monde globalisé », à l’aise tout aussi bien à Paris qu’à New York, Los Angeles, Londres ou Bruxelles, eux qui sont du bon côté du manche, celui où on donne les ordres aux subordonnés pour qui l’on peut éprouver ici et là quelque compassion individuelle mais pour qui, globalement, on a un mépris de classe rarement atteint dans l’Histoire.

 

Un détail, pour conclure sur eux, deux des trois « chèvres » rencontrées au début de ce billet ont été élues. Après les avoir entendues, on s’inquiétera seulement les concernant de ce qu’elles ne se perdent pas au Palais Bourbon…

 

Autre détail sans rapport avec le précédent : trois des quatre sièges attribués à la Corse ont été remportés par des nationalistes. Les mêmes tenant l’Assemblée de Corse, on peut penser que ce résultat ne manquera pas de raviver les revendications autonomistes pour ne pas dire indépendantistes. Comment Emmanuel Macron envisage-t-il l’avenir de la Corse, lui qui a sur place d’excellents amis du côté de Bonifacio, à commencer par son maire Jean-Charles Orsucci, Pierre Ferracci, dirigeant du groupe ALPHA, dont deux villas construites illégalement devraient être détruites et, surtout, son fils, Marc Ferracci, 39 ans, professeur d’économie à l’université Panthéon-Assas et à Sciences-Po, spécialiste du marché du travail et ami intime. Le lecteur intéressé sur tout ça lira ici avec profit cet article d’Hélène Constanty qui semble bien connaître la situation…

 

 

@ suivre…

 



19/06/2017
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