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Réforme des retraites : vers un passage en force

Jeudi 30 janvier 2020

 

  1. Réforme des retraites : vers un passage en force
  2. Plan de paix Trump-Netanyahu : no chance !
  3. L’Angleterre est une île

 

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  1. Réforme des retraites : vers un passage en force

 

Les journées d’actions se succèdent avec un succès tout aussi inégal que désormais méprisé par les médias mainstream. Le coronavirus qui sévit en Chine est désormais le centre de toutes leurs attentions. Ainsi de cette journée du 24 janvier qui, comme on le voit sur la photo ci-dessous, a réuni à Paris des centaines de milliers de personnes avec, faut-il le remarquer, aucun affrontement avec la police, un cortège ininterrompu entre la Place de la République et celle de la Concorde. Comme c’est désormais l’habitude, les chiffres fournis par le ministère de l’intérieur, volontiers repris par les médias, divergent singulièrement de ceux des organisateurs. Ici, 249 000 vs 1,3 million ! Et, s’agissant du cortège parisien, 31 000 vs 400 000 ! Outre l’absence d’incidents, on notera la diversité des secteurs mobilisés ce jour. Des cheminots, des traminots, bien sûr, mais aussi des avocats, des profs, des danseuses de l’Opéra, etc. Absents, depuis le début du mouvement, les étudiants et les lycéens, autrement dit les premiers intéressés à cette réforme avec ce constat affligeant qu’ils semblent anesthésiés, convaincus que de retraite ils n’auront point et que leur seule chance est de « sauver leurs fesses » sur le mode individuel qui sied si bien à cette génération et qui leur a été si consciencieusement enfoncé dans le crâne…

 

Manifestation parisienne du 24 janvier sur le quai des Tuileries à Paris

 

S’agissant de « l’opinion », la cause semble entendue : deux tiers des français désapprouvent la réforme, estiment qu’elle devrait être retirée. Sans que, bien sûr, cela n’émeuve la macronie ou les éditocrates qui la servent… de sorte que le gouvernement, fort du constat que rien ne l’oblige à reculer, que la grève reste limitée, que le temps passant, les secteurs les plus combatifs – SNCF et RATP pour l’essentiel – en sont à reprendre le travail, il prévoit un examen en « procédure accélérée » au parlement avec, s’il le fallait, un 49-3 dont la Vème République a le secret…

 

Le Conseil d’État, consulté « pour avis », a eu six jours pour le rendre. Il est assassin pour le pouvoir. La « noble institution », plus haute juridiction administrative, faut-il le rappeler, et pas vraiment à ranger au rayon des officines gauchisantes, souligne les failles de ce qui lui a été soumis : « Étude d’impact » jugée « insuffisante » pour « certaines dispositions », ne répondant pas « aux exigences générales d’objectivité et de sincérité » et manquant de « précision », pour, notamment, « vérifier que cette réforme est financièrement soutenable ». « Le Conseil d’État constate que les projections financières ainsi transmises restent lacunaires et que, dans certains cas, cette étude reste en deçà de ce qu’elle devrait être ». Et de poursuivre : « Il incombe au gouvernement de l’améliorer encore avant le dépôt du projet de loi au Parlement, en particulier sur les différences qu’entraînent les changements législatifs sur la situation individuelle des assurés et des employeurs, l’impact de l’âge moyen plus avancé de départ à la retraite […] sur le taux d’emploi des seniors, les dépenses d’assurance-chômage et celles liées aux minima sociaux ». Quant à la procédure suivie, l’institution estime qu’elle n’a pas été en mesure de « mener sa mission avec la sérénité et les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la sécurité juridique de l’examen auquel il a procédé ». Et de noter : « Cette situation est d’autant plus regrettable que les projets de loi procèdent à une réforme du système de retraite inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir un système social qui constitue l’une des composantes majeures du contrat social ». S’agissant de la clarté et de la lisibilité du nouveau système résumé par la slogan gouvernemental « chaque euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous », le Conseil d’État estime que « le choix d’une détermination annuelle de chacun des paramètres du système […] aura pour conséquence de limiter la visibilité des assurés proches de la retraite sur les règles qui leur seront applicables ». En clair, personne ne saura à quelle sauce il sera mangé ! Quant aux promesses du ministre de l’Éducation nationale sur une revalorisation des primes des enseignants destinée à compenser le manque à gagner du nouveau système, le jugement est sévère : « Sauf à être regardées, par leur imprécision, comme dépourvues de toute valeur normative, ces dispositions (sont) contraires à la Constitution ». Rien moins !

 

Autre problème, la promesse faite par le Président de la République de mettre à la disposition de chaque citoyen un simulateur. Le citoyen a appris depuis ce qu’il convenait de faire de cette promesse : le simulateur ne sera fonctionnel que bien après l’adoption prévue de la loi ! Dans un an, dit-on… Tout juste le gouvernement se contente-t-il de mettre en ligne 70 « cas-types » ayant pour seul but de montrer des gagnants sans le moindre souci de représentativité. En outre, tous les calculs faits tablent sur une stabilité de l’« âge d’équilibre » à 65 ans quand tout montre que, précisément, celui-ci a vocation à évoluer avec l’espérance de vie, autrement dit à croître vers 67 ans. Tout ceci est donc un pur et simple montage destiné aux « gogos ».

 

Bref, chacun aura compris que tout ceci n’est qu’artifice. Et, « cherry on the cake », la réforme soumise au vote du parlement sera à l’image du gruyère, pleine de trous au motif que ce seraient les « partenaires sociaux » qui, ultérieurement, les rempliraient et que des ordonnances viendraient alors les sanctionner. On croit rêver ! Bien évidemment, outre que les négociations entre les « partenaires sociaux » se résumeront à un « dialogue constructif » entre le MEDEF et la CFDT et son appendice UNSA, sans que l’on soit d’ailleurs certain que ces compères-là parviennent même à s’entendre, le parlement, dont la représentativité est une pure blague, votera tout cela « en cadence » sans y trouver à redire.

 

Du côté du « mouvement social », après la reprise du travail par les cheminots de la SNCF et les agents de la RATP, d’aucuns doutent, et pas forcément les plus les plus modérés. Ainsi Olivier Besancenot, ci-devant postier et porte-parole du NPA, qui laisse à penser que, faute d’un rebond significatif des secteurs qui, jusque-là, sont restés dans l’expectative, ce mouvement va à l’échec (voir ici le débat Besançenot-Ruffin organisé par Mediapart). Avec, bien sûr, derrière, tous les risques que cela suppose et que nous avions ici même soulignés. Qui peut en effet aujourd’hui penser que le chantage exercé en 2017 fonctionnera à nouveau ? Dans l’hypothèse d’un remake « Macron – Le Pen », qui peut sérieusement garantir que « la blonde » ne va pas gagner ? Personne ! Quant à « la gauche », quelles que soit les pincettes avec lesquelles il faut prendre le concept, on voit mal dans l’état actuel de ses divisions, de son influence, ce qui pourrait l’amener au second tour. À peu près d’accord sur rien, en dehors de vagues promesses écologiques à l’usage de la petite-bourgeoisie désormais plus soucieuse de la planète que du sort qui lui est fait et qui ont peu de chances de convaincre les couches populaires qu’elle a abandonnées depuis si longtemps, il est fort à parier qu’elle se retrouve dans la situation de l’Angleterre aujourd’hui, avec une Marine Le Pen en guise de Boris Johnson…

 

Alors, bien sûr, on peut se rassurer en se disant que l’avenir n’est écrit nulle part, on peut croiser les doigts, mettre des cierges, invoquer les mânes des anciens, etc. On peut… En tout état de cause et sauf à ce que de larges secteurs se mettent en mouvement, le gouvernement se prépare à passer en force via une « procédure accélérée » qui n’aura pour seul objectif que de mettre tous les mécontents – autrement dit deux français sur trois – devant le fait accompli et de « passer à autre chose », le vote de la loi faisant office d’éteignoir. Le Sénat, à majorité LR, n’en pourra mais et, de toute façon, n’a aucun moyen de peser sur la loi, l’Assemblée nationale ayant la main après une pseudo-phase de concertation entre les deux chambres.

 

Les élections qui viennent, municipales comme on sait, seront sans doute difficiles pour la macronie. Mais leur proximité aura l’avantage de servir le « passons à autre chose » tant attendu du pouvoir. Les commentateurs vont pouvoir se lancer dans de longues exégèses des résultats, les grandes villes étant censées à leurs yeux représenter le pays tout entier et, ce, d’autant mieux qu’eux-mêmes y vivent… Bref, un non-événement politique en vue. Passé ce cap, le pouvoir ne va évidemment pas s’arrêter en si bon chemin. Instruit de l’échec du mouvement social actuel, il pourra se livrer au pires exactions sans opposition tangible jusqu’à 2022. Bien évidemment, les rancœurs accumulées n’ayant trouvé aucun terrain d’expression politique d’ici là ne feront que s’accumuler. Et 2022, à l’image de ce qui s’est passé aux États-Unis avec Trump ou au Royaume-Uni avec Boris Johnson, risque fort d’être le lieu de la vengeance de ces millions de français que le pouvoir aura cru bon de mépriser et d’ignorer…

 

  1. Plan de paix Trump-Netanyahu : no chance !

 

Donald Trump, tout à son affaire de complaire aux groupes religieux chrétiens fondamentalistes qui soutiennent Israël, vient de dévoiler son « plan de paix » pour le Moyen-Orient. Quand on le voit soutenu pour la circonstance par Benyamin Netanyahou, « Bibi », on comprend que la paix n’est pas pour demain. Reconnaissance de l’ensemble des colonies juives que condamne le droit international, souveraineté d’Israël sur l’ensemble de la vallée du Jourdain, reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’État hébreu, les palestiniens devant se contenter des faubourgs Est qui sont en dehors de la ville et séparée de celle-ci par la « clôture de séparation », autrement dit par le mur qu’Israël a érigé depuis 2002, interdiction à cet éventuel État d’avoir la maîtrise de son espace aérien, démilitarisation de la Bande de Gaza et, bien sûr et sans surprise, renoncement à tout retour des « réfugiés » issus des guerres de 1948-1949 et 1967. Bref, un « non plan de paix » en infraction avec l’ensemble des résolutions votées à l’ONU. Quant à la continuité de cet improbable État palestinien, elle serait assurée par des tunnels, des routes et des ponts…

 

 

Nul ne parie sérieusement un shekel, un dollar ou un euro sur ce plan de paix. Tout le monde a compris que son seul intérêt est de voir les USA reconnaître l’existant ou, comme le dit crûment le « journal de révérence » dans son édition du 30 janvier, de « donner carte blanche à Israël », autrement dit de valider la situation insupportable faite aux palestiniens. Et tout le monde a compris aussi que Trump est en campagne électorale. Il s’agit pour lui, on le sait, de s’assurer du soutien sans faille de l’ensemble de ces culs-bénits intégristes qui font la pluie et le beau temps dans le Middle-Ouest. On cherchera vainement à expliquer rationnellement comment de tels chrétiens peuvent rêver d’un « Grand Israël » et en quoi cela ferait advenir le retour du messie que les uns et les autres appellent de leurs vœux… sans que ce soit le même. Tout ceci dépasse l’entendement. Une chose est sure, quelle que soit la lassitude de la population palestinienne, sa volonté de faire la paix, rien dans ce plan n’a une quelconque chance de lui apparaître comme un quelconque espoir. Pour que chacun en soit assuré, voici une carte de ce que serait l’État palestinien si le plan de Trump s’appliquait…

 

 

  1. L’Angleterre est une île

 

C’est par cette phrase qu’André Siegfried introduisait sa leçon à Sciences po dans les années 1950… et le feuilleton du Brexit ne fait que le confirmer. Les députés britanniques viennent de faire leurs adieux au Parlement européen, une page se tourne. Boris Johnson sort grand vainqueur de ces trois années de tergiversations. Les partisans du Remain en sont pour leurs frais et son opposition travailliste est affaiblie comme jamais. Faute d’avoir su renouer avec les couches populaires dont il a été, des décennies durant, le représentant politique, le parti travailliste a préféré tergiverser sur cette question, livrant sur la question du Brexit un discours inaudible quand Boris Johnson n’avait de cesse de marteler, contre l’avis d’une partie de ses troupes, que c’était là la seule question qui vaille. Les partisans du Remain voulaient un nouveau référendum. Ils l’ont eu, ce sont les dernières élections générales et son résultat est sans appel. Les citoyens britanniques n’apprécient guère que l’on veuille remettre en question le vote qu’ils ont exprimé. Or c’est précisément ce que proposait le Labour. Ils ne lui ont pas pardonné. Jeremy Corbyn, faute de l’avoir compris et tout à son affaire de concilier la chèvre et le chou au sein de son parti, en paie le prix. Se concilier le « boboland » travailliste fut une erreur majeure. Boris Johnson, lui, et quoique son parti fut tout aussi divisé sur la question, a fait le choix contraire. Il y est allé à fond et a ainsi obtenu une majorité absolue au parlement en conquérant des circonscriptions que le parti travailliste avait depuis près d’un siècle… Une déroute, une vraie déroute ! De celles dont on ne se remet pas ou très très difficilement.

 

Les adieux du Parlement européen aux députés britanniques

 

Alors, bien sûr, le Royaume-Uni va maintenant se lancer dans de longues négociations commerciales, avec l’UE bien sûr, mais aussi les USA, la Chine, etc. Et, évidemment, la crainte légitime que l’on peut avoir, c’est de voir s’installer aux portes de l’Europe, de l’autre côté du Channel, un paradis fiscal de plus. On a déjà dans l’UE, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas… Un de plus en vue, donc, à nos portes. Bien évidemment, les eurobéats de tout poil auront à cœur de nous montrer le coût pour le pays de cette sortie de l’UE. En attendant, chez nous, il en est qui s’inquiètent, ce sont tous ces pêcheurs bretons qui risquent de se voir interdits de pêcher dans les eaux du Royaume… Notons quand même, d’ores et déjà, que la catastrophe qui nous était annoncée au lendemain du référendum de 2016 ne s’est pas produite. Quant à l’idée simpliste selon laquelle le Royaume-Uni n’aurait pour seule porte de sortie que de s’aligner inconditionnellement sur les USA de Donald Trump, la voilà déjà démentie avec l’affaire de la 5G et de Huawei. Bref, tous ceux qui ignorent de quel bois se chauffe l’Angleterre vont se mordre les doigts. Sans doute Boris Johnson n’est-il pas exactement le « gendre idéal » façon Macron et consorts… mais ce pays en a vu d’autres et pendant que nos européistes jouent la carte de la mondialisation heureuse dont l’UE est la pointe avancée, les USA de Trump et le Royaume-Uni de Johnson dessinent une autre voie. Qu’elle ne soit pas pavée de roses ne fait aucun doute mais comme le souligne volontiers Emmanuel Todd, la pointe avancée du capitalisme est et reste le monde anglo-saxon. C’est lui qui avec Reagan-Thatcher a ouvert la voie au « néo-libéralisme » dans les années 80 et cette page se referme aujourd’hui. Manifestement, nos « élites » ne l’ont pas compris et il leur en cuira. Et à nous avec eux…

 

@ suivre…

 

 



30/01/2020
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