Semaine convenue...
Lundi 12 décembre 2016
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Sujets traités :
- Valls candidat, comme prévu…
- Bernard Cazeneuve, en guise de crépuscule ;
- L’État d’urgence pour huit mois de plus ;
- La Hollandie se rebiffe, Vincent Peillon prié de se présenter ;
- Du côté du centre, avec Emmanuel Macron ;
- Italie : Matteo Renzi out ;
- Alep va tomber, les pleureuses se répandent ;
- Trump et la finance.
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1. Valls candidat, comme prévu…
C’est sans surprise, donc, que quatre jours après que François Hollande a annoncé qu’il renonçait à se présenter, Manuel Valls fait acte de candidature à la présidentielle en son « fief » d’Évry. Rien de vraiment surprenant, un discours aussitôt prononcé, aussitôt oublié, se voulant rassembleur en se teintant de couleurs de gauche qui ne convaincront que peu de monde tant ce triste personnage a fait profession de diviser la gauche, théorisant à l’occasion de la loi El Khomri dont il fut le véritable maître d’ouvrage la « gauche irréconciliable »… après avoir théorisé la recomposition à gauche, la fin du PS et l’alliance au centre. Autant dire que la tentative aujourd’hui de « rassembler » a autant de chances de convaincre que ne l’aurait le directeur de Goldman Sachs de combattre le capitalisme financier ou, plus près de nous, de Junker de lutter contre l’évasion fiscale.
2. Bernard Cazeneuve, en guise de crépuscule
Manuel Valls ayant bien compris tout l’inconfort qu’il y aurait à continuer d’occuper la place à Matignon, il a, comme prévu, choisi de démissionner. François Hollande averti, le remplacement se fit dans le jour qui suivit avec la nomination de celui qui fut le « 1er flic de France » en guise de remplaçant et, à l’occasion, un mini-remaniement où l’on voit deux sous-ministres échanger leurs places.
Les media caressèrent un moment l’espoir que NVB (Najat Vallaud-Belkacem) ou MST (Marie-Sol Touraine) fussent promues… et durent se contenter de l’austère figure de Bernard Cazeneuve. La presse loua l’homme du combat contre le terrorisme et, bien sûr, oublia de rappeler la gestion calamiteuse des manifestations du printemps contre la loi El Khomri. CDD de 5 mois pour gestion des affaires courantes, on sait que rien d’autre ne va se passer dans le pays en dehors de la campagne pour les élections présidentielles. Et, après Hollande qui a renoncé, Bernard Cazeneuve a annoncé que lui-même arrêterait la politique à l’issue. Bref, ça sent le fagot, comme on dit et, sauf à ce que de nouveaux attentats ne viennent ensanglanter le pays, chacun sait qu’il ne se passera rien de notable tant à Matignon qu’à l’Élysée. Tristes personnages jouant une triste fin de partie d’un calamiteux quinquennat…
3. L’État d’urgence pour huit mois de plus
Signe de la lâcheté politique la plus insigne, le gouvernement s’apprête à faire reconduire au Parlement l’État d’urgence pour huit mois de plus. Bien évidemment, ni la droite ni la gauche ne regimbera à l’entreprise dont tout le monde sait pourtant qu’elle est inutile. La mission parlementaire en charge de cette affaire, présidée par deux gauchistes, Jean-Frédéric Poisson et Dominique Raimbourg, vient pourtant de publier un rapport sans équivoque sur le sujet (voir ici) Toute l’entreprise consiste à ne pas apparaître comme faible sur ce sujet sensible. Toutes les personnes en charge de cette affaire savent que cet état d’exception ne sert à rien depuis un bon moment. Qu’importe ! En langage courant, on appelle cela de la démagogie ou, terme à la mode s’il en est, du « populisme »... Mais on sait que ce terme ambigu n’a d’autre cible que ceux qui ont le mauvais goût de se situer hors du « cercle de la raison » cher à Alain Minc.
Accessoirement, la prolongation de l’État d’urgence aura une incidence importante pour l’élection présidentielle puisqu’elle va obliger les candidats à ne tenir meetings que soigneusement contrôlés par des entreprise de sécurité ruineuses. On voit bien que du côté des candidats qui n’ont pas l’heur d’être soutenus par de généreux donateurs, ça va coincer et limiter d’autant leur campagne. Tout bénéfice pour les candidats du système qui bénéficient déjà de financement publics considérables…
4. La Hollandie se rebiffe, Vincent Peillon prié de se présenter
Après le ridicule meeting de la BAP ‒ « la Belle Alliance Populaire » ‒ et la candidature de Manuel Valls, il se trouve quelques hiérarques socialistes, tendance Hollande ou Aubry, pour, à la fois ne pas goûter excessivement la candidature de Valls et ne pas apprécier outre-mesure celle d’Arnaud Montebourg, l’homme qui propose de faire du patriotisme économique et qui a un moment proposé de nationaliser la sidérurgie « au nom de l’intérêt national ». Deux forces dont on dit qu’elles sont au cœur du PS voient donc d’un mauvais œil le match Valls-Montebourg au second tour de la primaire du PS. Instruites de ce qui s’est passé à droite avec un troisième homme devenu le premier, elles tentent donc une manœuvre similaire avec la candidature de Vincent Peillon, l’ex-ministre de l’Éducation nationale du gouvernement Ayrault.
L’homme est plutôt dans le style cultivé et brillant. 56 ans, professeur certifié de Philosophie avant d’être docteur et directeur de recherches, il se fit remarquer au PS avec Arnaud Montebourg et Julien Dray comme fondateur d’un courant, le NPS (Nouveau Parti Socialiste) puis à l’occasion de son travail conjoint dans le cadre d’une mission d’information parlementaire sur « les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière et du blanchiment des capitaux en Europe » qu’il présida conjointement avec Arnaud Montebourg en 2002. Pour une bio plus compète, voir ici. À ceux et celles qui croiraient déceler dans cette entreprise un brin de « gauchisme », rassurons-les, Vincent Peillon fut, avant que n’éclate l’affaire du Sofitel de New York, un soutien à la candidature de DSK… et, comme on sait, avec DSK et les siens, la finance avait là de vrais ennemis…
Les premières déclarations de Vincent Peillon dans le cadre de cette candidature aux primaires du PS montrent bien le créneau choisi en déclarant mettre en avant le bilan du quinquennat dans le but de rassembler la gauche, oxymoron destiné à marquer tout à la fois la soumission à la Hollandie et l’opposition à Manuel Valls, réputé être tout à la fois le Brutus de François Hollande et le diviseur de la gauche et du PS.
Les deux mois qui viennent nous diront si l’entreprise de recyclage prend. L’affaire ne semble pas perdue d’avance pour lui, même si son passage à l’Éducation nationale n’a pas laissé que de très bons souvenirs avec la réforme du temps scolaire dans le premier degré dont la mise en œuvre pose plus de problèmes qu’elle n’en résout. Avantage toutefois pour lui sur ce terrain emblématique, Najat Vallaud-Belkacem avec sa réforme du collège a fait bien pire depuis…
S’agissant de la primaire du PS, on notera l’abandon de Marie-Noëlle Lienemann qui fait qu’une seule femme participera à la primaire du PS, l’immense Sylvia Pinel qui, après avoir annoncé sa candidature à la présidentielle, vient de se raviser pour ne déclarer participer qu’à la primaire du PS… On se doute qu’à la source de ce revirement il y a un coup de fil de la rue de Solférino expliquant aux radicaux que s’ils persistaient dans leur choix de présenter un candidat à la présidentielle, ils auraient une candidature socialiste dans leurs circonscriptions. Le genre de chantage qui a tôt fait de calmer les ardeurs… Quant au résultat que fera Sylvia Pinel à la primaire, on sent que ça va être de l’ordre du raz-de-marée…
Autre curiosité, le 1er secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, vient conjointement de lancer un appel demandant à Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron de participer impérativement à la primaire du PS tout en interdisant au MRC et à Nouvelle Donne de le faire. Comprenne qui pourra… Tout ceci n’est que tactique de bas étage et signe de la panique qui saisit le PS à l’idée que, comme le prédisent certains, le cycle de 72 prenne fin et, avec lui, le PS et son hégémonie sur la gauche. Dans la série, on apprend que la numéro trois du gouvernement, en la personne de Ségolène Royal, réfléchissait à soutenir Emmanuel Macron au motif « qu’il amène de l’air dans la vie politique »… On la savait quelque peu incontrôlable, elle confirme… Dans le même temps, la maire de Paris, Anne Hidalgo, vient d’afficher son soutien à Vincent Peillon tandis que, sans surprise, Najat Vallaud-Belkacem choisit de soutenir Manuel Valls…
5. Du côté du centre, avec Emmanuel Macron
Enfin, mais est-on encore à gauche, Emmanuel Macron vient de tenir meeting ce samedi soir à Paris. Le programme du candidat « ni de droite, ni de gauche » commence à se préciser mais l’ensemble des media n’a retenu que les trois dernières minutes au cours desquelles on se demande si le candidat n’avait pas un peu forcé sur quelque substance prohibée… Ces mêmes media ne diront pas un mot du coût de ce meeting et encore moins de son financement : 350 000 euros ! Comme on le voit ci-dessous, les 10 000 personnes alors rassemblées n’étaient pas exactement représentatives de « la France qui se lève tôt » ou des quartiers difficiles. Un public propret, très Science-Po, fac de droit ou écoles de commerce pour les plus jeunes, installés confortablement dans la vie pour les autres… enthousiastes à l’idée de faire du neuf avec du vieux.
L’intérêt de tout cela est, bien sûr, que le paysage des deux blocs se fissure singulièrement. « La » gauche ou ce qui en tient lieu fait dans le pluriel, le multiple. Quant à la droite, les suppôts de François Fillon rament… L’affaire de la fin de la Sécurité sociale, fruit du compromis de la Libération, fait des vagues et si nul ne sait encore si François Bayrou tentera le coup, on apprend que Rama Yade se lance… Bref, avec Macron, ça se bouscule au centre. Comme par ailleurs Fillon ne s’interdit pas de reconquérir une partie des votes FN tendance Catho- Sud-Est de la France, le deuxième tour annoncé Le Pen-Fillon ne va peut-être plus autant de soi qu’on nous l’annonce… surtout si l’on a en tête que les électeurs ont le chic ici et ailleurs de démentir les pronostics médiatiques.
6. Matteo Renzi out
On le pressentait, le chantage de Matteo Renzi n’a pas pris ou trop bien pris. Les Italiens se sont prononcés massivement (plus de 65 % de participation) et à près de 60 % en faveur du NON. Une claque ! Bien évidemment, dans les capitales européennes, on a crié au loup populiste… Matteo Renzi n’a eu dès lors d’autre choix que de démissionner. Victoire apparente qui a sans doute satisfait toux ceux qui ont peu goûté le fringant florentin mais, surprise, pas de dissolution du parlement dans l’immédiat, l’ancien ministre des affaires étrangères, Paolo Gentiloni prend la suite et s’appuiera sur la majorité parlementaire PDS pour gouverner. L’homme n’a rien d’un rebelle et, au contraire, tout pour plaire à l’establishment européen et, en particulier, à la Commission européenne qui fait la pluie et le beau temps dans les gouvernements de l’Europe du Sud.
Deux dossiers à traiter : la réforme électorale inachevée avec le NON au referendum et, plus sérieusement, même si on en parle peu, le sauvetage de la plus ancienne banque du monde, BMPS (Monte dei Paschi di Siena fondée en 1472), qui pose un très sérieux problème de solvabilité, ses actifs étant perclus d’emprunts toxiques irrécouvrables et essentiellement possédés par 26 000 petits épargnants qui sont dans l’incapacité de souscrire à la règle du « bail in » adoptée en 2013 qui consiste, en substance, à faire porter sur les actionnaires le coût du sauvetage. Il va donc falloir plier cette règle via une « recapitalisation préventive » qui sauverait les apparences en ne mettant à contribution que les seuls investisseurs institutionnels… façon détournée de sauver la banque avec de l’argent public. En jeu : 5 milliards d’euros…
7. Alep va tomber, les pleureuses se répandent
Ne reste en ce lundi que 10 % d’Alep-Est aux mains des « rebelles » dont on a appris il y a peu qu’ils empêchaient les populations sous leur contrôle de s’enfuir. Cette nouvelle n’a évidemment pas fait les titres même si, à l’évidence, il ne s’agit rien moins que de gentils « rebelles » prenant en otages la populations qu’ils sont censés défendre…
C’est dans ce contexte de débâcle et de chute du dernier carré que trois parlementaires français font parler d’eux : Cécile Duflot, Hervé Mariton et Patrick Menucci ont décidé d’accompagner le « maire » d’Alep-Est, Brita Agi Assan, dans une « entreprise humanitaire » dont on peine à cerner le but réel et les contours. Outre que l’on peut s’interroger sur la qualité de « maire » du syrien, on se demande bien comment cette triplette compte passer la frontière turque et arriver à Alep-Est en proie aux bombardements de l’aviation russe et des chars syriens d’Afez El Assad. Tout ça sent l’entreprise de com’ de trois pieds nickelés en mal de popularité… On espère quand même pour eux qu’ils sauront rester à l’abri et ne seront pas pris en otages, otages pour lesquels, comme chacun le sait, les contribuables que nous sommes seraient mis à contribution… Heureusement, après l’emballement médiatique sur cette aventure, on apprend ce soir que les pieds nickelés n’ont même pas réussi à passer la frontière turque… Afez El Assad a eu chaud…
Reste que, sur le terrain, la succursale d’Al Qaïda, le Front El Nosra, va perdre là son dernier bastion et qu’il n’y a que dans nos media aveuglés par la haine anti-russe qu’on s’en plaindra…
8. Trump et la finance
On se souvient que Donald Trump avait fort habilement, via quelques tweets, laissé à penser que le candidat de la finance, c’était Hillary et que lui saurait mettre au pas ce monde-là. Les électeurs de l’Ohio, du Wisconsin et plus généralement du nord industriel des USA ont bien voulu le croire. Peu raisonnable en réalité et les nominations auxquelles il procède en ce moment en témoignent à l’envi puisque ce ne sont pas moins de trois anciens de Goldman Sachs qui vont occuper des postes clés. Après Steve Mnuchin au poste de secrétaire au Trésor et de Stephen Bannon, au poste de « stratège en chef », c’est au tour de Gary Cohn, vice-président exécutif de Goldman Sachs de se voir confier la charge de prendre la tête du Conseil économique national (Nec) de la Maison Blanche !
On se gardera de sourire car, à l’évidence, une telle trahison ne manquera pas d’aigrir un peu plus davantage ceux qui en font les frais, tous ces malheureux, ces « loosers » de la mondialisation qui n’avaient en fait, à cette élection, de choix qu’entre la candidate de Wall Street et le candidat de Wall Street, qu’entre la peste et le choléra. Et on regrettera du coup d’autant plus que Bernie Sanders n’ait pas gagné la primaire démocrate, lui qui était le seul à faire utilement concurrence à Donald Trump auprès de cet électorat et qui eut pu faire basculer le vote dans ces États clés qui ont fait l’élection de Trump.
Quant au résultat du vote lui-même, le décompte n’est toujours pas fini… On sait qu’Hillary Clinton devance Donald Trump de plus de deux millions de voix (1,6 % des voix) mais que ceci n’empêchera en rien l’élection du milliardaire. Inutile toutefois de rêver d’une évolution du mode de scrutin. Les conditions à remplir sont en effet telles qu’elles rendent impossibles tout changement : majorité des deux-tiers aux deux chambres puis ratification de la modification par les trois quarts des États (38). Du béton voulu par les « pères fondateurs » – George Washington, Alexander Hamilton, John Madison – qui, se méfiant du peuple, de la multitude, ont imaginé un tel système lors de la convention de Philadelphie en 1787, laissant la démocratie directe s’exprimer au niveau des représentants au Congrès tandis que serait « tempérée » cette expression démocratique par un système aristocratique conduisant à l’élection du Président au suffrage indirect via des « grands électeurs » libres de leur choix (voir l’article du Monde ici).
Sinon, Trump continue à « faire le buzz » via des nominations qui défrisent telle celle d’Andy Puzder, ci-devant magnat de la malbouffe et des bas salaires, ministre du travail… ou encore, dernière en date, celle du patron d’ExxonMobil, Rex Tillerson, grand ami de Vladimir Poutine, au poste de Secrétaire d’État, le nom qu’on donne au ministre des Affaires étrangères chez l’Oncle Sam. La liste ne s’arrête pas là : voir ici pour des compléments éventuels.
@ suivre…
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