Rentrée tardive…
Dimanche 22 septembre 2019
- Petite chronique rétrospective de l’été passé
- Municipales en vue…
- Réforme des retraites : la « mère des batailles »…
- Un mot de l’international
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Reprise difficile : manque de motivation et contingences familiales difficiles se sont liguées pour repousser sans cesse toute écriture. En sorte que voici une rentrée qui s’aligne sur celles qu’ont connues, votre serviteur inclus, les élèves des années 60. Comme on le sait, au nom de l’efficience, on a grignoté au fil des décennies ces longues et « grandes » vacances pour aboutir à ce que l’on sait, un système éducatif en déroute que confirme toutes les évaluations internationales. Mais, bon, Baudelot et Establet nous l’assuraient, et leurs successeurs ne manquent jamais de le confirmer, « le niveau monte »… et les écarts se creusent.
- Petite chronique rétrospective de l’été passé
Que retenir de ces mois d’été ? Sur le terrain « affaires politiques », c’est bien sûr le « scandale De Rugy », du nom de ce président de l’Assemblée nationale remplaçant Nicolas Hulot au pied levé et dont la presse a fait ses choux gras de ses repas somptueux lorsqu’il était président de l’Assemblée nationale avec homards et grands crûs pour des petites sauteries n’ayant que peu à voir avec ses fonctions. Celui qui, auparavant, apparaissait sous un jour sévère se retrouva donc pris « la main dans le pot de confiture » et devant l’adversité, s’enferrant volontiers jusqu’à déclarer qu’il n’aimait pas les homards… se vit contraint à la démission pour se voir remplacé par Élisabeth Borne dont le moins que l’on puisse dire est que sa sensibilité écologique n’est pas exactement le trait dominant. Remplacement qui montre au passage, une fois de plus, que les rayons de la macronie sont vides… Nul ne s’est aventuré, en dehors de Marianne, à tenter d’expliquer comment celui qui se présentait volontiers comme rigoureux et incorruptible avait pu se retrouver en telle situation. C’est qu’en effet il eut fallu expliquer que le sieur François Goullet de Rugy, après avoir divorcé de la mère de ses deux enfants, s’était remarié il y a peu (décembre 2017) avec une journaliste de Gala, titre emblématique de la presse « people », Séverine Servat, à qui le sobriquet de « croqueuse d’hommes » va comme un gant. En clair, les petites sauteries de François n’étaient l’œuvre que de Madame, et Monsieur, entièrement subjugué, n’avait pas osé y trouver à redire et s’y opposer… Dès lors, en ces temps de « politiquement correct » érigé en système de pensée, comment avouer que le 4ème personnage de l’État était sous la coupe d’une femme ?
Au rayon « politique étrangère », on eut droit au G7 de Biarritz dont la presse a pudiquement tu le déploiement extraordinaire de forces de l’ordre mobilisées pour l’occasion pour se concentrer sur le faire-valoir des initiatives présidentielles. Autant le dire sans barguigner, aujourd’hui, tout le monde a oublié. Bref, une ville en état de siège en plein été et pour rien. Ainsi vont les succès de la diplomatie française… Retenons quand même qu’Emmanuel Macron semble avoir compris l’impasse dans laquelle nous étions depuis François Hollande en ne voulant pas discuter avec Vladimir Poutine. Comprenant sans doute que nous n’avions rien à gagner à continuer sur cette ligne avec une Amérique agressive tant avec la Chine que la Russie, sans parler de l’Iran, Emmanuel Macron a pris à contrepied l’ensemble de ceux qui communient dans le concert de jérémiades à l’endroit de la Russie en rencontrant Vladimir Poutine ce 19 août à Brégançon.
Plus intéressant fut en Italie la tentative de Salvini de rompre son alliance avec le M5S afin de provoquer des élections anticipées dont tous les sondages laissaient à penser qu’il les eut largement gagnées. Seulement voilà, l’Italie n’est pas la France et le parlement italien et le président de la République y ont leur mot à dire de sorte que Salvini a perdu son pari en obligeant ainsi les ennemis d’hier, le M5S et le PD, à s’unir et former une nouvelle majorité. Bien évidemment, l’attelage est instable puisque les uns, le M5S, sont favorables à l’abandon de la ligne Lyon-Turin quand les autres, le PD, sont contre. Même configuration avec le « revenu universel » ou le « pacte budgétaire », autrement dit la politique d’austérité que l’UE entend faire mener à l’Italie. Notons au passage que cette reconfiguration de l’espace politique italien aura permis d’éviter à l’UE de devoir nommer un commissaire européen italien eurosceptique au profit d’un eurobéat, Paolo Gentiloni, membre du PD.
Et puis, durant cet été 2019, comment passer sous silence l’Amazonie en feu ? Sous le feu des critiques, Bolsonaro, le dictateur élu comme l’on sait maintenant grâce à l’embastillement de Lula avec la complicité avérée de l’appareil judiciaire brésilien, s’en va expliquant que si l’Amazonie est en feu, c’est la faute des ONG… En face, dans le camp des « sauveurs de la planète », gros titres sur « le poumon de la Terre » en feu… Outre que le vrai poumon de la Terre, pour 50 %, excusez du peu, ce sont les océans avec le phytoplancton, l’Amazonie contribue au mieux à hauteur de 9 % de l’oxygène produit (voir ici l’article de National Geographic sur le sujet) par photosynthèse sur Terre. En outre, et comme en témoigne la photo de la NASA ci-dessous, on peut s’étonner de l’émoi suscité par l’Amazonie en feu et du silence qui entoure l’Afrique sur le même sujet.
En fait, si l’on veut être un peu sérieux, le vrai danger ne réside pas tant dans la fumée produite par ces incendies ou dans le déficit d’oxygène induit mais dans la biodiversité que de tels incendies mettent en danger. Mais, bien sûr, c’est infiniment moins médiatique. Quant à l’Afrique, elle attendra des jours meilleurs pour qu’on s’émeuve de la culture sur brûlis qui la fait flamber chaque année. On comprend aisément que c’est là affaire tant de développement que de « culture » et dans la nôtre marquée par le péché originel de l’esclavage et de la colonisation, il est politiquement correct de regarder ailleurs…
On ne peut raisonnablement passer en revue ces mois d’été sans dire un mot de ce qui s’est passé outre-Manche où Theresa May a dû rendre son tablier pour se voir remplacée au 10 Downing Street par Boris Johnson, alias BoJo, par la grâce de la prise de contrôle du parti Conservateur (Tories). La question, on le sait, est celle de savoir si, suite au référendum de 2016 où le Brexit l’a emporté avec 52 % des suffrages (avec un taux de participation de plus de 72 %), le Royaume-Uni quitterait l’UE avec un accord (soft brexit) ou sans (hard brexit). Les négociations n’ayant pas abouti avec Theresa May (qui, rappelons-le, était favorable au « remain »), buttant tout particulièrement sur la frontière avec l’Irlande du Nord, la perméabilité de celle-ci signifiant rien moins que de conserver des frontières ouvertes aux quatre vents avec une République d’Irlande (Eire) membre de l’UE, le Royaume-Uni n’étant pas la France – pays dans lequel on peut contourner le résultat d’un référendum (2005) et avoir un parlement croupion – le débat fut intense. BoJo, en démagogue accompli, quoiqu’issu des meilleures écoles du pays (Eton et Oxford), déclare vouloir respecter le vote de 2016 et, faute de parvenir à obtenir un accord de sortie de l’UE acceptable, veut un hard Brexit le 31 octobre. Le Parlement britannique n’en voulant pas dans sa majorité actuelle, il a décidé de le court-circuiter en le mettant en vacances jusqu’à cette date, la tradition voulant que, suite à la nomination d’un nouveau premier ministre, il en aille ainsi. Souci : jamais le parlement n’a été mis en congé aussi longtemps. Autre souci : la démocratie britannique ne dispose pas d’une constitution, tout y est affaire de « tradition », d’usages… En d’autres termes, si la manœuvre est un peu grosse et peut être moralement condamnée, rien ne l’empêche formellement. Autre souci et d’une tout autre ampleur, ainsi que le montre à l’envi la carte ci-dessous, le Brexit a été refusé tout à la fois par l’Écosse, dont les velléités d’indépendance sont notoires et l’Irlande du Nord qui redoute que le rétablissement de la frontière avec l’Irlande ne relance la très cruelle guerre civile menée par l’IRA, sans parler de Gibraltar qui, de par sa position géographique, a tout à perdre elle aussi avec un rétablissement d’une frontière avec l’Espagne. Autrement dit, cette affaire de hard Brexit pourrait bien signifier à terme la désintégration du Royaume-Uni, les Écossais reprenant leur indépendance perdue en 1707 et l’Irlande du Nord rejoignant l’actuelle république d’Irlande dont elle est séparée depuis 1921.
Carte du vote exprimé lors du référendum de 2016 (Remain en orange, Leave en bleu)
On notera sur cette affaire que du côté du parti travailliste actuellement dirigé par Jeremy Corbyn, la question divise. Les parlementaires du Labour sont en effet majoritairement favorables au Remain ainsi, semble-t-il, que la majorité des adhérents du parti et, ce, au risque de se couper de l’électorat populaire qui a très majoritairement voté pour le Brexit. Ce hiatus est sans doute la raison pour laquelle Jeremy Corbyn a toujours été très prudent sur cette question. Sans doute favorable lui-même au Brexit dans le souci précisément d’obtenir que le Labour retrouve ses positions perdues dans les couches populaires, il a tout fait pour obtenir de nouvelles élections générales. Les élections partielles récentes montrant que le flou entretenu ne payait pas et souhaitant sans doute conserver la direction du parti, seule voie pour arriver au 10 Downing Street, il semble s’être rallié aux remainers allant jusqu’à demander que l’on fasse un nouveau référendum en cas d’absence d’accord avec l’UE. Un « pliage de gaules » qui ne fait qu’aggraver le fossé béant qui sépare depuis Tony Blair le parti travailliste et le peuple qui souffre, comme l’a si bien montré Ken Loach. Au demeurant, rien ne prouve que les électeurs britanniques changeraient leur vote sur la question, n’en déplaise aux eurobéats de tout poils qui promettent, via des études frisant le ridicule, les dix plaies d’Égypte au Royaume en cas de hard Brexit…
Sans doute le lecteur trouvera-t-il que bien d’autres sujets eussent mérité de figurer dans ce court résumé de ces mois d’été. Ainsi fonctionne la mémoire commune, une actualité chasse l’autre et, en ce 20 septembre, à tort sans doute, on s’arrêtera là.
- Municipales en vue…
La prochaine échéance électorale du pays s’annonce, ce sont les municipales. 36 000 élections selon des modes de scrutin qui vont du scrutin majoritaire plurinominal à deux tours avec panachage dans les communes de moins de 1 000 habitants au scrutin de liste à deux tours avec représentation proportionnelle pour les communes plus grandes avec les cas particuliers de Paris, Marseille et Lyon où ce mode de scrutin s’applique aux arrondissements de la ville, les conseillers d’arrondissement se réunissant pour former le conseil municipal de la ville (pour le détail, voir ici).
Il va sans dire que dans la très grande majorité des communes, la lecture « politique » de l’élection est peu probante. Dans nombre d’endroits, on reconduit sans barguigner le maire en place, si tant est que celui-ci consente à se représenter. Sur ce terrain d’ailleurs, et sans doute plus que par le passé, nombre de maires se sont exprimés pour signifier leur ras-le-bol de se voir si maltraités par l’administration représentée par les préfets. Alors que la révision constitutionnelle de 2003 a introduit dans l’article 1er que « l’organisation de la République est décentralisée », nombre d’élus constatent que leurs marges de manœuvres se réduisent au fil des ans. Les transferts promis ne suivent pas tandis que leur barque se charge, l’État « jacobin » ne concevant la décentralisation que comme l’outil lui permettant de faire des économies budgétaires. Dans le même temps, sont arrivées les « communautés de communes » dans laquelle ils sont appelés à siéger mais où leur poids est réduit à peau de chagrin et où règnent les petites connivences entre amis. Bref, nombre d’élus locaux, les maires en premier lieu, ont l’impression de compter pour du beurre.
Sur le terrain politique, seules les villes de plus de 100 000 habitants donneront le la et, bien sûr, au soir des élections, les yeux médiatiques se tourneront quasi exclusivement vers les « grandes villes », entendez Paris, Marseille, Lyon, Lille, Bordeaux, Toulouse, etc.
S’agissant de Paris, la bataille est engagée. LREM, forte de ses succès à la présidentielle et aux législatives qui ont suivi rêve de faire « main basse sur la ville ». La maire en place, Anne Hidalgo, y a une réputation exécrable tant par son attitude que sa politique. L’affaire des Vélib et Autolib plombe quelque peu l’ambiance, sans parler du projet de fermeture du périphérique qui viendrait après la fermeture des voies sur berges. Elle conduit théoriquement une majorité « de gauche », cette « gauche hollandaise » bien connue, celle qui a privatisé le service des PV, par exemple. De cela, Boboland se moque, tout à son affaire avec les vélos, les patinettes électriques et les magasins bio. Le prix du m2 parisien vient de dépasser, en moyenne, les 10 000 euros, ce qui signifie que, plus que jamais, il est devenu impossible de se loger pour un couple « moyen » qui ne serait pas l’heureux bénéficiaire d’un généreux héritage. Bref, Paris, après avoir été une ville populaire est devenue un fief de la bourgeoisie.
LREM, le parti bourgeois, le « parti de l’ordre » du moment, donc, se rêve en vainqueur à Paris. Plusieurs candidats ayant montré le bout du nez, une commission d’investiture a fait semblant de les entendre, pardon, de les « auditionner », comme on dit dans la novlange managériale qu’ils affectionnent tant. Parmi eux, Cédric Villani, le mathématicien-député aux habits baroques et Mounir Mahjoubi, un temps secrétaire d’État au numérique le disputaient à Benjamin Griveaux, le candidat officiel, entendez ayant reçu l’onction présidentielle. Pour ceux qui ont la mémoire courte, rappelons que c’est celui qui a fui par une porte dérobée lorsque la porte de son ministère a été enfoncée par des Gilets jaunes armés d’un « transpalette » que des médias complaisant ont décrits comme un « engin de chantier » (la scène est ici). Benjamin-Blaise Griveaux est une figure emblématique de la macronie. Strauss-Kahnien de la première heure, passé à la macronie à l’occasion de la présidentielle, il fait partie du « premier cercle » macronien. Cultivant volontiers le mépris qui est le lot commun de cet aréopage, il qualifiera ainsi d’« abrutis » ses adversaires malheureux (voir ici), ce qui n’empêchera pas Mounir Mahjoubi de se rallier à lui, façon sans doute de confirmer le délicat épithète qui venait de lui être attribué… Un auprès de qui cette affaire ne passe pas, c’est Cédric Villani qui a compris, un peu tard – mais pouvait-il faire autrement que de jouer le jeu ? – que la commission d’investiture LREM était une farce dont il a été le dindon. Aussi a-t-il décidé de faire sa liste. Stupeur dans le camp de la macronie, un « rebelle » s’affiche ! Le règlement de LREM a beau prévoir l’exclusion en un tel cas, il a été décidé de surseoir à la mesure. C’est sans doute là l’effet d’un doute. C’est que le Benjamin Griveaux a à peu près le « charisme d’une huître » et qu’il se pourrait bien que Boboland lui préférât le porteur de lavallière. Aussi a-t-on décidé « en haut lieu » d’attendre et voir… ce que donneront les sondages. Si d’aventure il s’avérait que le meilleur cheval LREM est Villani, il sera toujours temps de déconnecter Griveaux… Au demeurant, s’agissant de Villani, bien malin celui qui peut dire un mot de son programme puisque lui-même s’emploie à n’en rien dire. Interrogé perfidement sur le prix du m2 parisien par Rémi Buisine pour Brut (voir ici), il a fait comme tous les macronistes, botté en touche, se réfugiant dans la « complexité » du dossier. C’est commode, classique mais peu convaincant.
Embrassons-nous, Folleville...
En tout état de cause, une qui apprécie ces bisbilles c’est Anne Hidalgo qui se dit que si la macronie a deux candidats, elle a peut-être une chance de sauver sa place… Dans un scrutin majoritaire, via la prime au vainqueur qu’il sanctionne, on peut parfaitement être minoritaire en voix et majoritaire en sièges. On l’a un peu oublié, mais c’est ainsi que Bertrand Delanoë, en 2001, a conquis la mairie de Paris face à un RPR divisé entre Philippe Séguin, candidat officiel du parti, et Jean Tibéri, maire sortant et dissident (voir ici). Quoique majoritaire en voix, d’une courte tête, sur l’ensemble de la ville, la droite a perdu en sièges.
Nous aurons largement le temps de suivre ce feuilleton dont l’issue, au demeurant, nous importe assez peu. Anne Hidalgo, Benjamin Griveaux, Cédric Villani, tout ça, vu du « peuple » d’en bas, importe peu. Il y a en effet beau temps que ce peuple-là est sorti du périphérique. Il est des jours où on est bien content de ne plus être parisien…
Quant aux autres villes, Marseille, Lille, etc. elles ne manqueront pas d’attirer notre attention. Nous y reviendrons…
- Réforme des retraites : la « mère des batailles »…
Signe des temps, Jean-Paul Delevoye, « haut-commissaire à la réforme des retraites » entre au gouvernement auprès d’Agnès Buzyn. Plus précisément, il peut désormais assister au conseil des ministres (sans être ni ministre ni secrétaire d’État) mais pourra ainsi, le moment venu, défendre le projet de loi de réforme des retraites au parlement. Où l’on voit par-là que le pouvoir ne pouvait décemment pas confier cette tâche à la ministre de la Santé qui ne connaît à peu près rien du délicat dossier… Par-delà les oiseux débats sur l’âge pivot, ce qui est en jeu à travers la réforme « systémique » qui se profile, c’est la baisse du niveau des pensions d’une très grande majorité des retraités. L’objectif affiché n’est-il pas en effet de passer de 14 % à 10 % du PIB. Pour atteindre un tel objectif, et alors que le nombre de retraités ira croissant, il est prévu de mettre en place le principe de l’équivalence de chaque euro cotisé. Traduit en termes intelligibles, cela revient à comptabiliser l’ensemble de l’activité de chacun au lieu et place du système actuel qui calcule le « taux de remplacement » sur les 25 meilleures années dans le secteur privé et les six derniers mois dans le régime des fonctionnaires. Cerise sur le gâteau, la valeur du point qui détermine le montant de la pension variera selon la conjoncture économique. Autrement dit, et comme cela se pratique déjà en Suède, les retraités pourront voir le montant de leur pension baisser. Le projet prévoit donc, en fait, de substituer à l’actuel système de pension à revenu garanti un système dans lequel d’une part, les actifs ne sauront rien du montant de leur future pension et, d’autre part, auront des pensions qui varieront au fil du temps en fonction de paramètres dont on peut aisément prévoir qu’ils leur seront peu favorables. C’est donc une baisse programmée des pensions qui se fait jour.
Les services de Jean-Paul Delevoye font évidemment tout pour cacher cela. Ils ont ainsi produit un document qui compare le montant de la retraite dans le régime actuel avec un départ à 62 ans avec celui d’un départ à 64 ans dans le futur régime. Procédé grossier que n’ont pas manqué de corriger d’autres études montrant, à travers des exemples indiscutables, que le « taux de remplacement », terme technique calculant le rapport entre la dernière rémunération perçue et le montant de la retraite, baisserait dans d’effrayantes proportions.
Autre effet pervers, peu souligné dans les médias, les salariés qui le pourront, autrement dit les mieux payés, pourront se voir offrir des moyens de compenser cette baisse des pensions via des fonds du même nom auxquels le pays avait jusque-là échappé. Ou comment faire revenir par la fenêtre ce qu’on n’avait pas pu faire entrer par la porte…
Il va sans dire que le pouvoir, avec ce dossier, marche sur des œufs. Seuls les actuels retraités peuvent s’en désintéresser puisque le montant de leur retraite est garanti nonobstant le décrochage avec le coût de la vie qui a déjà commencé et qui a évidemment vocation à se poursuivre. Encore faut-il ne pas oublier, les concernant, que le revenu médian des retraités actuels est de 1 760 euros par mois (source DREES), autrement dit que la moitié des retraités de ce pays, soit environ 8,5 millions de retraités, gagnent moins que ça. Pas de quoi faire bombance, non ? En outre, et s’agissant de ceux qui seraient épargnés par la réforme du fait de leur proximité avec leur départ en retraite – on parle de 5 ans – le gouvernement ne s’interdit nullement de procéder à des réformes « paramétriques » du type de celles qui ont été menées par les gouvernement précédents (réformes Balladur (1999), Fillon (2003), etc. – via l’augmentation du nombre d’années de cotisation pour la « durée d’assurance », l’augmentation des taux de cotisation, etc.
Il serait également question de toucher aux pensions de réversion, autrement à ce système qui fait qu’une personne touche une partie de la pension de son conjoint décédé. Elle est actuellement de 50 % pour les fonctionnaires et, dans le secteur privé, de 54 % du régime de base et 60 % du régime complémentaire (où l’on voit par-là que les fonctionnaires ne sont pas les mieux lotis). Il serait question de plafonner la réversion à concurrence de 70 % du montant des pensions du couple et, par ailleurs, à n’ouvrir le droit à réversion qu’à partir de 62 ans au lieu des actuels 55 ans. Bien évidemment, ce système de réversion intéresse en premier lieu les femmes qui constituent le gros des troupes des bénéficiaires, ces messieurs ayant la courtoisie de disparaître avant elles... Si l’on ajoute que la pension de ces mêmes femmes est significativement inférieure à celle des hommes – de 42 % précisément ; 1 091 € en moyenne pour les femmes contre 1 891 € pour le hommes – on comprend sans peine que s’en prendre aux pensions de réversion signifie plonger dans la difficulté voire la misère un très grand nombre de veuves.
Alors, bien sûr, les médias mainstream ont commencé à pilonner et désinformer. Mais, sur ce dossier comme en beaucoup d’autres, il n’est pas sûr qu’ils parviennent à convaincre. La confiance est au plus bas, en particulier envers le personnel politique et la presse. Les Gilets jaunes sont passés par là, mais pas seulement. Les français, y compris les cadres, se doutent que cette affaire est loin d’être anodine. D’ores et déjà, certains se mobilisent. Ainsi a-t-on vu les salariés de la RATP – bus et métro parisiens – faire une grève massive ce 13 septembre dernier. Dans la foulée, on a appris que les professions libérales – avocats, médecins, infirmières, etc. – défilaient le 16 septembre pour défendre leur régime de retraite en ayant compris que leur caisse de retraite avait vocation à se voir piller (70 milliards quand même) et que leur taux de cotisation doublerait en passant de 14 à 28 %.
Les fonctionnaires ont par ailleurs tout à perdre avec le nouveau système. Désireux sans doute de ne pas se mettre à dos ceux d’entre eux qui sont armés, le gouvernement a d’ores et déjà annoncé que les militaires et les policiers conserveraient leur régime spécial… Une brèche est donc ouverte . Les enseignants qui constituent le gros des troupes de la Fonction publique d’État (mais ne sont pas armés), mal payés durant toute leur carrière et ne bénéficiant quasiment pas de primes, la Fonction publique hospitalière, tous ces agents publics que l’on sait à la fois mal payés et au bord de l’implosion auront sans aucun doute à cœur de défendre leur système actuel. Selon quelles modalités ? Va-t-on voir, comme cela se fait actuellement, chacun de ces secteurs se mobiliser séparément, se multiplier les revendications catégorielles au risque de se voir défaits les uns après les autres ou bien « le mouvement social » aura-t-il l’intelligence collective de mener un combat d’ensemble, public et privé, pour sauver ce qui mérite de l’être, à savoir un système qui, bon an mal an et quoiqu’imparfaitement, garantit un taux de remplacement correct et, donc, épargne au pays de voir ce qui se passe dans bien d’autres tels le Japon ou les USA, à savoir des vieux obligés de travailler pour survivre ?
255 000 personnes de plus de 85 ans (4,4 % de la classe d’âge) occupent un emploi aux USA (voir ici)
Nul ne peut préjuger de la réponse. Bien évidemment, le pouvoir est « maître des horloges ». Il a d’emblée reporté l’examen du projet de loi au lendemain des municipales et annoncé une phase de « concertation », ce mot à la mode qui signifie refus de négocier. Pas sûr que ces petites manœuvres soient de quelque utilité. Après « le grand débat », les français ont compris que toutes ces opérations ne sont que pure communication et que « concertation » signifie « cause toujours… »
- Un mot de l’international
Pendant ce temps, la Terre continue de tourner et l’Empire sort les griffes. Donald Trump tempête et menace… la Chine, la Russie, l’Iran. Alors que Barak Obama avait obtenu un accord tant avec Cuba que l’Iran, Donal Trump a décidé de tout mettre à bas. Cuba qui avait vu l’étau du blocus se desserrer et les touristes Étatsuniens venir en nombre doit se résoudre à revenir à l’état ante qui les contraint à une quasi autarcie. Idem avec l’Iran et l’accord sur le nucléaire. Usant de l’extra-territorialité de ses lois, tout pays qui commercerait avec l’Iran est sous la menaces de poursuites du département de la Justice US. En conséquence de quoi, les entreprises européennes qui avaient repris le chemin de Téhéran ont dû se résoudre à partir. L’UE, à la main de l’Allemagne, qui est elle aussi menacée par son grand ami US à travers ses exportations automobiles, a donc décidé de ne rien faire. Bref, une fois encore, l’UE est un « tigre de papier ». Enfin, s’agissant de la Chine, si l’on peut comprendre que l’Oncle Sam souhaite rééquilibrer sa balance commerciale déficitaire de 500 milliards de dollars par an, les procédés pour y parvenir rappellent des temps anciens avec des augmentations de droits de douane impressionnants. Huawei, sous des prétextes somme toute assez ridicules de possibilité d’écoute par le gouvernement chinois des utilisateurs de leurs smartphones – quand on sait ce que fait la NSA, on rigole… – doit cesser de se servir d’Androïd, le système d’exploitation de Google. Les Chinois n’étant pas vraiment stupides vont donc sous peu proposer leur propre système d’exploitation en coopération avec les Indiens et les Russes. On notera au passage la contradiction qu’il y a à reprocher à Huawei d’être dans la main du gouvernement chinois et l’interdiction faite à Google de continuer à lui vendre son OS. Enfin, si l’extraterritorialité des lois US s’appuie à la fois sur la technologie et la monnaie, une conséquence possible de l’affrontement en cours pourrait bien être de voir de plus en plus de pays s’en affranchir. On vient de le voir avec Androïd, on en parle moins en ce qui concerne l’abandon du dollar comme monnaie internationale des échanges où, là encore, Chinois, Indiens et Russes sont en passe de se mettre d’accord pour se passer du dollar. L’Empire du Milieu a une stratégie, « la nouvelle route de la soie » qui n’est en rien une plaisanterie et il se pourrait bien que l’offensive US menée par Trump l’accélère et que, sous une forme rénovée, se fasse jour une nouvelle partition géopolitique du monde dans laquelle l’Empire US serait à la peine. La puissance militaire US est évidemment sans commune mesure avec celle du reste du monde. Mais pour quel usage ? On l’a vu avec la Corée du Nord où, après les rodomontades de la première heure, Donald Trump a choisi d’en rabattre. On le voit encore aujourd’hui avec l’Iran où, après l’attaque des centres pétroliers saoudiens par les Houthis Yéménites soutenus par l’Iran, et les menaces d’intervention militaire de la première heure, Donald Trump se voit contraint à revenir à la raison : attaquer l’Iran signifierait plonger l’ensemble du Moyen-Orient dans la tourmente et avec lui, les ressources pétrolières et gazières de toute la région qui, rappelons-le, approvisionnent une grande partie de l’Occident.
Le complexe pétrolier d’Aramco en feu après l’attaque des drones yéménites
à Abqaiq, en Arabie Saoudite ce 14 septembre 2019
Une récente série télévisée, Years and Years, se déroulant dans une Angleterre post-Brexit imagine un Donald Trump réélu en 2022 envoyant une bombe nucléaire sur la Chine… Pour vraisemblable que puisse paraître cette série sur bien des aspects, il n’est pas sûr que l’Empire américain en voie de se voir supplanté aille jusqu’à de telles extrémités. Le pire n’est jamais sûr. En tout état de cause, se plier aux exigences américaines comme y consent l’UE avec constance depuis sa création n’est pas la meilleure façon de préparer l’avenir. On se prend à rêver d’une indépendance semblable à celle qu’entretenait notre pays dans l’après-guerre, on songe aussi au discours de Dominique de Villepin à l’ONU lors de cette guerre inutile menée contre l’Irak et dont on mesure encore aujourd’hui la folie. Au passage, il nous revient l’alignement d’un Tony Blair et les mensonges grossiers sur les armes de destructions massives dont prétendument l’Irak de Saddam Hussein aurait été détenteur. Bref, il nous revient un temps pas si lointain où notre pays a su être indépendant… et on mesure le risque qu’il y a de le voir se mettre entièrement dans la main de l’Empire via, par exemple, l’utilisation de Window$ par nos armées ou, au nom de l’interopérabilité des forces de l’OTAN, l’utilisation de logiciels US dans nos avions, nos sous-marins ou nos missiles. Est-ce bien raisonnable ? N’est-ce pas là tout simplement trahir en se condamnant à être les supplétifs de l’Empire et renoncer, de fait, à toute indépendance ?
Bien d’autres sujets eussent mérités d’être ici abordés tels la PMA en cours d’examen au Parlement, les manifestations de Gilets jaunes qui ont repris, les « marches pour le climat » ou bien la pitoyable entreprise de récupération du thème de l’immigration par Emmanuel Macron. La longueur de ce post invite à surseoir à l’examen de tout cela. Ce n’est que partie remise…
@ suivre…
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