L’échéance se rapproche…
Dimanche 8 janvier 2017
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Sujets traités :
- Jugement de la CJR : tout un symbole !
- Primaires du PS : c’est parti !
- Et à droite ?
- Un paysage fragmenté et incertain
- L’enseignement privé a la cote et les démissions d’enseignants du public se multiplient…
- Nécrologie
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Après une pause de trois semaines, consacrées pour l’essentiel à quelques libations de fin d’année et une actualité politique ayant pris congé, nous reprenons notre chronique du temps présent, du temps politique, pour l’essentiel.
1. Jugement de la CJR : tout un symbole !
On a beau s’y attendre, s’en douter, se demander chaque fois s’ils oseront… Et, chaque fois, ils osent. Déjà surpris par le complaisant réquisitoire du Procureur de la CJR demandant la relaxe, on ne le fut pas moins par le jugement rendu : Christine Largarde est bien coupable de négligence mais dispensée de peine ! Et encore faut-il entendre que la négligence ne concerne que le non-recours suite à l’arbitrage rendu et non la procédure d’arbitrage qu’elle n’avait certes pas elle-même engagée mais qu’elle aurait pu abandonner au profit d’un procès « normal », ce que lui conseillait son administration… En outre, cerise sur le gâteau, cherry on the cake, la condamnation ne sera pas inscrite à son casier judiciaire. Trop aimable…
La prévenue n’avait ce lundi 19 décembre même pas pris la peine de se présenter devant la CJR pour entendre l’énoncé du verdict… La directrice générale du FMI est au-dessus de ça… Le FMI, sitôt connue la sentence, a réaffirmé sa confiance à CL. Le contraire eut été étonnant…
Les réactions furent nombreuses, à commencer par celle de l’Élysée qui s’est empressé d’assurer Christine Lagarde du maintien de toute sa confiance et du ministère des finances qui s’est fendu d’un communiqué signé au nom du gouvernement : « Christine Lagarde exerce son mandat au FMI avec succès et le gouvernement maintient toute sa confiance en sa capacité à y exercer ses responsabilités », précisant que les faits incriminés étaient antérieurs à sa prise de fonction au FMI…
La CJR, rappelons-le, est composée de 15 membres : trois magistrats de la Cour de cassation et douze parlementaires : six députés, six sénateurs répartis actuellement en 5 LR, 5 PS, 1 UDI, 1 PRG (voir ici).
Le premier à dégainer fut François Bayrou qui, en fin lettré, prit un malin plaisir à rappeler la fin de la fable de La Fontaine, Les animaux malades de la peste :
« Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
Pour poursuivre par : « En tant que ministre de l’économie, elle a elle-même décidé de ne pas faire appel de l’outrageante attribution de l’indemnité pour préjudice moral de 45 millions d’euros ». « Cette culpabilité étant reconnue, comment peut-elle ne pas être sanctionnée ? » « On imagine bien que les fonctions occupées par Mme Lagarde au FMI sont la raison principale de son impunité », a-t-il ajouté pour poursuivre par : « On voit bien que la CJR est une juridiction d’exception sur laquelle pèsent des interrogations démocratiques. (…) D’autres, qui sont des exécutants, vont comparaître devant la justice pénale d’ici quelques mois ». Il est amusant de rappeler, à l’occasion, qu’une des promesses du candidat Hollande était de mettre fin à cette justice d’exception qu’est la CJR. Selon le mot célèbre du petit père Queuille, Henri de son prénom, les promesses n’engagent que ceux qui reçoivent…
Autre réaction, à gauche, celle de Jean-Luc Mélenchon : « Je pense que les Français vont très mal réagir parce qu’une négligence qui coûte 400 millions, c’est tout de même une négligence dont on ne permet pas le millième ou le milliardième au Français qui a un compte en banque, qui par négligence dépasse le rouge habituel. Donc va se développer parmi les Français le sentiment d’un deux poids, deux mesures, et savez-vous quoi, ils ont raison. »
Comment ne pas imaginer que le « tous pourris » déjà prégnant ne se répande avec de tels jugements ? Comment comprendre qu’une caissière de supermarché puisse se retrouver condamnée pour un « détournement » de 82 cts et que la DG du FMI soit exemptée de peine pour plus de 400 millions ? Comment les membres de la CJR n’ont-ils pas pu imaginer le caractère désastreux de leur dispense de peine, n’ont-ils pas compris le message qu’ils envoyaient au peuple français, celui d’une caste au-dessus des lois, d’une caste qui n’est comptable de rien, d’une caste arrogante qui n’a de cesse, en outre, de demander toujours et encore plus de sacrifices au commun des mortels quand eux sont à l’abri et intouchables ? Désastreux, vraiment désastreux, en vérité !
À noter, pour finir sur ce point, qu’une pétition demandant que Christine Lagarde passe devant la justice ordinaire des hommes a, sitôt connu ce jugement de cour, recueilli plus de 200 000 signatures alors même que les signataires savaient pertinemment que l’entreprise était vouée à l’échec. C’est là le signe d’une défiance à l’endroit de cette cour de justice que certains devraient entendre…
2. Primaires du PS : c’est parti !
Ayant bien compris que la période des fêtes de fin d’année serait une période d’inaudibilité totale et faute d’avoir organisé la primaire bien avant, c’est-à-dire ayant choisi un calendrier réputé être à la main de François Hollande, le PS se retrouve devoir régler son affaire de primaire dans un laps de temps très court puisque le 1er tour se tiendra le 22 janvier et le second le 28. Les candidats n’ont donc, en réalité, que deux semaines pour se faire entendre. On sait maintenant qu’ils seront sept, la commission électorale du PS ayant déclaré ex aprupto que certains candidats étaient exclus d’office de la compétition et que d’autres, tel l’ancien inspecteur du travail Gérard Filoche, ne remplissaient pas les conditions de parrainage imposées aux membres du PS.
Trois candidats hors PS s’y présentent avec pour seule ambition de légitimer que cette primaire est autre chose qu’une primaire du PS et rabattre quelques voix radicales, écolo et modem vers le candidat du PS dans le seul but de bénéficier d’une absence de candidat du PS contre eux et certains de leurs amis aux législatives de 2017. Petite entreprise, donc, et, pour mémoire, on les citera ici par ordre alphabétique… Ce sont Jean-Luc Benhamias, Sylvia Pinel et François de Rugy.
Plus sérieusement, et en dehors de ces aimables figurants, le 1er tour de cette primaire concerne quatre candidats du PS, Benoît Hamon, Arnaud Montebourg, Vincent Peillon et Manuel Valls.
Le hasard fait que l’ordre alphabétique ici choisi semble être un axe gauche-droite, Manuel Valls se situant clairement dans ce que le PS a de plus à droite et le couple Hamon-Montebourg étant réputé être plus à gauche, dans le style « frondeurs »…
Après cinq années passées au gouvernement dont trois à sa tête, Manuel Valls est bien conscient qu’il souffre d’un handicap que les nombreux ralliements dont il bénéficie au sein du gouvernement ne combleront pas. Il tente donc assez désespérément de faire oublier la politique qu’il a conduite en proposant, par exemple, de limiter l’usage du 49-3 aux seules questions budgétaires, lui qui est responsable de son application à six reprises pour faire passer la loi Macron et la loi Travail. L’entreprise, disons-le, a peu de chances d’aboutir et, la primaire étant fondamentalement une opération assimilable au choix du candidat qui a le plus de chances de gagner, il ne va pas de soi que les électeurs qui consentiront à participer au scrutin du 22 janvier choisiront le plus clivant d’entre eux, Manuel Valls. Son passage dans « L’Émission politique » de France 2 ce 5 janvier a confirmé la difficulté dans laquelle il est, les sondages produits à la fin de l’émission montraient un pouvoir de conviction exceptionnellement faible au regard d’autres avant lui, tel Benoît Hamon. L’édition du Monde du lendemain l’a souligné : le virage à gauche de Manuel Valls ne convainc personne et son passé de 1er ministre lui colle à la peau, lui aliène une large fraction de l’électorat de gauche.
Ces difficultés prévisibles sont sans doute la raison pour laquelle Vincent Peillon a choisi de se présenter. Son programme, tel qu’il l’a présenté en ce début de semaine, est de type « PS pur jus », « centriste », avec quelques mesurettes destinées à faire « gauche » et un européisme de bon aloi. Tout en expliquant que, contrairement à d’autres, lui n’a jamais « craché dans le soupe », il entend tout à la fois assumer le bilan tout en faisant, ici et là, quelques critiques susceptibles de lui rallier ceux que Manuel Valls a exaspérés sans se retrouver pour autant sur la ligne des frondeurs. Ainsi a-t-il expliqué qu’il reviendrait sur l’inversion de la hiérarchie des normes de la loi travail. C’est là une « ligne de crête » difficile à tenir mais qui n’a, en fait, pour seul but que d’arriver au second tour de la primaire et paraître alors comme celui qui est le mieux à même de rassembler… Il a quelque peine à faire campagne. Son ton « techno-intello » est un peu réfrigérant et il ne va pas être facile pour lui de susciter enthousiasme et engouement. Pas sûr, aussi, que la ligne pro-Europe ait quelque chance de convaincre en dehors du petit cercle de plus en plus déserté de ceux qui aiment à penser que l’Europe est un beau projet réformable…
Quant aux deux derniers, ils affichent clairement leur différence quant à la ligne Valls-Hollande du quinquennat. Tous deux ont fait le choix de quitter le gouvernement et ils comptent bénéficier des voix des « déçus de la gauche » qu’ils pensent, à raison sans doute, beaucoup plus nombreux que ceux qui s’en déclarent satisfaits. Ils font le pari que ce « peuple de gauche » se déplacera le 22 janvier et balaiera les candidats institutionnels Valls et Peillon. Ils le font avec leur style, Benoît Hamon jouant volontiers de la fibre écolo tandis qu’Arnaud Montebourg tend à se présenter comme celui qui est « Mélenchon compatible », c’est-à-dire, une fois désigné comme candidat du PS, le seul à même de discuter avec quelques chances de succès avec Jean-Luc Mélenchon – ou, en tout cas avec le PCF – et, accessoirement, avec le candidat que s’est donné EELV, Yannick Jadot. Arnaud Montebourg a, durant son passage au ministère des finances et à la suite de sa participation à la primaire de 2011, affiché des postions anti-finance et favorables au « produisons français » qui peuvent séduire. On sait, en outre, que, dans cette veine, il n’est pas des plus mal vus des petits entrepreneurs qui se retrouvent essorés par les grands groupes. Si l’affaire de la marinière a beaucoup fait ricaner les bobos, elle a marqué nombre d’esprits qui se désolent de la désindustrialisation du pays et voient dans la « démondialisation » dont il s’est fait le chantre une voie possible vers un capitalisme revenu des aventures de l’ouverture tous azimuts qui nous vaut un chômage massif depuis des décennies. Que cette option soit, en outre, plutôt dans l’air du temps – comme en témoignent tout à la fois ce que Trump semble obtenir aux USA avec Ford ou, chez nous, la dernière couverture d’Alternatives Économiques – ne peut que l’encourager à poursuivre dans cette voie.
Pour ces deux candidats qui chassent, en gros, sur les mêmes terres, la difficulté est d’abord de convaincre le « peuple de gauche » de se déplacer le 22 et, en outre, de tuer l’autre, autrement dit de faire en sorte que cet électorat les perçoivent comme le vote utile du premier tour au détriment de l’autre. Rien de tout cela ne va de soi et bien malin celui qui peut aujourd’hui afficher quelque certitude quant à la hauteur de la participation à cette primaire et le sens du vent qui y soufflera…
Enfin, notons qu’en dépit des piètres résultats obtenus lors de la primaire de la droite, les instituts de sondage persistent avec la primaire du PS. Gageons que ce sera avec le même succès, la faille ontologique de ces sondages résidant dans l’absence de connaissance du corps électoral, les mêmes causes produiront les mêmes effets. À titre d’exemple, citons le sondage IFOP que vient de publier ce jour le JDD qui donne Manuel Valls en tête avec 36 %, suivi de Arnaud Montebourg avec 24 % et de Benoît Hamon avec 21 %. Le même sondage fait un mois auparavant indique que Valls aurait perdu 8 points pour l’essentiel gagnés par Hamon (pour les détails, voir ici) À noter que, sous cette hypothèse Valls-Montebourg, le second tour donnerait Montebourg gagnant avec 52 %. Bien évidemment, les sondeurs nous expliqueront pour se dédouaner que tout ceci n’est qu’une photographie, etc. Le coup du parapluie…
Pour ceux et celles que cela pourrait intéresser, et pour conclure sur ce point, rappelons le calendrier des opérations :
- trois débats d’avant 1er tour – le jeudi 12 janvier (sur TF1 en partenariat avec RTL et L'Obs), le dimanche 15 janvier (sur BFM, LCI et iTélé), le jeudi 19 janvier (sur France Télévision et Europe 1) – et un débat d’entre deux tours, le mercredi 25 janvier.
- deux tours de scrutin : dimanche 22 janvier et 29 janvier.
Lien utile ici.
3. Et à droite…
Après deux mois, voire trois, de primaires de la droite et la victoire par KO de François Fillon, le vent tourne et le candidat de la droite étant connu, l’intérêt se porte sur son programme et tout particulièrement sur la partie du programme qui concerne l’avenir de la Sécurité sociale ou, plutôt, de ce qui se dessine comme devant être la fin de celle-ci. Les porte-parole et le candidat lui-même doivent en effet se livrer à des contorsions sans fin pour arriver à justifier que l’assurance maladie ne couvrirait que les maladies graves, le reste étant laissé aux mutuelles ou aux assurances privées. Un rhume, une grippe, etc. sont-ils des maladies graves, doit-on se refuser à les prendre en charge au risque, à supposé qu’elles ne soient pas considérées comme telles, qu’elles se transforment en maladies graves faute d’avoir été traitées au départ. Croyant sans doute bien faire en ce début d’année, le candidat de la droite a cru bon de justifier sa réforme de la santé ce mardi sur TF1 avec un « Je suis gaulliste, et de surcroît je suis chrétien : ça veut dire que je ne prendrai jamais une décision qui sera contraire au respect de la dignité humaine, de la personne humaine, au respect de la solidarité » du plus bel effet. Dans un pays réputé laïque comme la France, devoir en arriver là a suscité maintes réactions, dont celle de François Bayrou, réputé chrétien lui aussi, et accessoirement père de famille nombreuse : « Qu’est-ce que ça à voir ? Je suis croyant, je ne vais pas m’offusquer d’un mouvement de foi mais comment peut-on arriver à mélanger la politique et la religion à ce point de cette manière déplacée ? Le principe de la France c’est qu’on ne mélange pas religion et politique (…) On a l’impression qu’on en est à un point – en raison d’un certain nombre de dérives – où on considère que tout doit être l’objet d’une instrumentalisation politique. »
Par delà ce rappel à l’ordre de bon aloi sur la laïcité, cette vive réaction de François Bayrou est destinée à donner crédit aux dénégations faites peu de jours auparavant quant à un pacte secret le liant à François Fillon, pacte dont l’objet serait de limiter les dégâts de la candidature Macron dans les rangs de la droite et du centre.
En tout état de cause, même si l’on peut penser que François Bayrou n’a plus guère les moyens d’être candidat, son avenir politique, Alain Juppé ayant été défait, passe par un accord de non agression avec Fillon ou, en tout cas, un accord de désistement au second tour de la présidentielle. On se souvient en effet qu’en 2012, ayant été candidat contre Nicolas Sarkozy et ayant, en substance, appelé à voter pour François Hollande au second tour, il s’était vu perdre l’élection législative qui avait suivi, l’UMP dirigée par Sarkozy et le PS lui ayant chacun opposé un adversaire.
L’hypothèse Bayrou candidat prend forme au fil des jours comme en témoigne Le Monde daté du 7 janvier dans lequel il donne une interview où il enfonce le clou.
Les stratèges de la droite ont bien compris que la candidature Macron se situait au centre tant socialement qu’idéologiquement et qu’en conséquence il fallait que quelqu’un occupe cet espace et rabatte une bonne partie de ces voix sur Fillon pour espérer gagner. Loin de la victoire assurée, nombreux sont ceux qui comprennent que l’éparpillement des voix ne concerne pas que la gauche. Les sondages ayant en maintes occasions montré leurs faiblesses, les pronostics et les vœux de l’intelligentsia ayant été si souvent contredits, Trump ayant montré que l’on pouvait gagner une élection en se situant à l’extrême-droite et en opposition apparente au « système », la crainte est forte que, dans un affrontement de second tour Fillon-Le Pen, ce soit la blonde qui l’emporte, nombre d’électeurs de gauche choisissant de se laver les mains du résultat. On peut donc penser que, si candidature Bayrou il y a, cela revient pour la droite à accepter le risque de voir se lisser quelque peu les résultats de la droite et du centre avec un Bayrou autour de 5 points qui consentirait ensuite, fut-ce au prix quelques contorsions sémantiques, à ramener ses électeurs vers Fillon au second tour.
Ceci n’empêchera pas, bien sûr, de poursuivre le travail de déminage qu’ont entrepris les Fillonistes puisque c’est même à ce prix que le ralliement de Bayrou aurait quelque chance d’être compris.
Il reste que cette affaire du sort de la Sécurité sociale ressemble fort, pour Fillon, au scotch du capitaine Haddock. Au FN, on ne s’y trompe pas : la ligne Philippot est plus que jamais d’actualité. Elle seule semble en mesure d’utiliser cette faiblesse de Fillon. En foi de quoi, la nièce, Marion Maréchal-Le Pen, est priée de faire profil bas et se voit accessoirement privée d’interventions médiatiques. Pendant que Marine Le Pen affiche calme et sérénité, ses suppôts sur les réseaux sociaux sont à l’offensive. Instruits de l’expérience Trump, tout ce petit monde a compris l’usage qui pouvait être fait de tweets destructeurs. Après « Ali Juppé », c’est au tour de « Farid Fillon » d’être visé (pour plus de détails, voir ici ce que le JDD a relevé sur ce point) et l’élection présidentielle américaine a montré combien il était difficile de lutter contre de telles campagnes.
À propos de cette dernière et à la veille de l’entrée de Donald Trump à la Maison Blanche, les media n’ont de cesse de nous expliquer que la victoire de Donald Trump aurait tout à voir avec Poutine et ses services. Et le concert de propagande de nous expliquer la nocivité des services secrets russes qui auraient été à la manœuvre. Bien évidemment, ils sont dans l’impossibilité d’apporter la moindre preuve et doivent, comme lors de l’affaire des ADM de Saddam Hussein, se contenter de se faire le relai des services secrets US. Cela ne les gêne bien sûr en rien et, dans ce concert de propagande, nul ne relève que s’il est des services qui interviennent partout et tout le temps, c’est bien la NSA dont on sait avec certitude qu’elle est même allée jusqu’à pirater le téléphone de dirigeants européens, à commencer par celui d’Angela Merkel qui l’a mis sur la place publique. Edward Snowden a, quant à lui, prouvé que cet espionnage ne concernait pas que quelques dirigeants mais bien le monde entier. Quant au fait que la Russie de Poutine serait intervenue dans l’élection américaine en piratant les méls d’Hillary Clinton, aucun de ces média de cour ne revient sur le contenu de ces méls et la connivence avec Wall-Street et les requins qui y opèrent qu’ils mettaient en évidence. Si Hillary a perdu l’élection, c’est bien, d’abord et avant tout, le fruit de cette proximité du couple Clinton et sa fondation conduisant la « rust belt » à se détourner d’elle. Que ces grands esprits n’aient pas contre-attaqué en mettant en évidence ce qui apparaît maintenant au grand jour, à savoir que Donal Trump lui-même est loin d’être un milliardaire indépendant des milieux d’affaires, voilà qui laisse songeur sur les capacités des stratèges de campagne d’Hillary Clinton…
4. Un paysage fragmenté et incertain
Après une période où tout semblait indiquer que l’on se retrouverait avec une candidature Hollande pour le PS et, donc, un affrontement Fillon-Le Pen au second tour de la présidentielle, le paysage politique en ce début 2017, à quatre mois de l’élection reine, semble avoir singulièrement bougé. Les certitudes tombent les unes après les autres. François Hollande a déclaré forfait et va tenter de faire une sortie honorable avec le temps qui lui reste dans un palais de l’Élysée déserté, un gouvernement ectoplasmique sans prise sur le réel n’ayant pour seule tâche que d’expédier les affaires courantes et parer au plus pressé. L’extrême-droite, au terme de ce quinquennat, est au plus haut au point que ce qui avait pu apparaître comme une surprise au soit du 21 avril 2002 semble maintenant une quasi certitude au soir du 23 avril 2017. La droite républicaine semble en ordre de marche avec la candidature Fillon mais, comme cela a été précédemment souligné, elle peut se retrouver prise en tenailles entre l’extrême-droite susceptible de lui prendre des voix populaires et le centre avec la candidature d’Emmanuel Macron. Le « trublion » que les sondages situent autour de 15 % semble en effet puiser ses forces dans un centre réunissant tout à la fois la droite du PS et l’espace politique du Modem. Que, comme en témoigne son meeting de la porte de Versailles, ce candidat dispose en outre de moyens extra-ordinaires soutenu qu’il est manifestement par une partie des possédants et de la petite-bourgeoisie aisée n’est pas fait pour rassurer. Quant au PS, quel que soit le candidat qu’il se donnera au soir du 29 janvier, il semble dans une totale et profonde incapacité à « rassembler son camp », condition nécessaire pour espérer vaincre. Une partie de son électorat lorgne sur Macron, une autre sur Mélenchon de sorte que plane sur lui le fantôme de Gaston Defferre... Avec, derrière, et de façon mécanique, la quasi certitude de voir le groupe socialiste à l’Assemblée nationale réduit à peau de chagrin et, avec lui, une réduction drastique des moyens alloués à ces élus, sans parler du risque de voir le parti éclater...
Quant à la gauche, celle qui en tout cas peut sans risque d’être démentie s’en prévaloir, autrement dit ce que les media aiment à appeler « la gauche de la gauche », s’il est vrai que son candidat, Jean-Luc Mélenchon, peut rassembler tous ceux que le pouvoir socialiste a écœuré, il reste que le pari fait de parvenir à être au second tour est loin d’être gagné. Certes, la chaîne Youtube de JLM bat tous les records en ayant à ce jour un peu moins de 150 000 abonnés, certes nombre d’électeurs de gauche se tournent sans trop barguigner vers lui mais le chemin qui reste à parcourir en passant des 15 % dont il est actuellement crédité aux 20 voire 25 % qu’il conviendrait d’obtenir est loin d’être aisé. Les media « officiels » ne l’aideront certes pas comme en témoigne le résumé fait par France inter de son passage avec Léa Salamé où il se voit transformé en suppôt de Donald Trump. Après avoir été présenté comme ami de Poutine, c’est cohérent et dans une ligne politique qui peine à cacher ses sympathies… À noter, au passage, que dans sa dernière livraison, JLM table sur une candidature Bayrou (voir ici), sans que l’on sache s’il l’espère ou la souhaite et sans qu’une raison ne soit apportée à l’appui de cette éventualité. En tout état de cause et s’agissant de communication, JLM semble avoir compris qu’à l’image de ce qu’ont pu faire les « papys », Bernie Sanders aux USA et Jeremy Corbyn au Royaume-Uni, il y avait moyen de contourner le système médiatique en place via les réseaux sociaux et autre Youtube. Bien évidemment, ces outils s’adressent en priorité aux plus jeunes, ceux qui ont cessé depuis un bon moment de lire un journal de type L’Obs, Le Point, Le Monde, Le Figaro, etc. mais aussi de regarder la télévision et ses 20 h qui n’ont plus de journal d’information que le nom. Ne compter que là-dessus serait évidemment une erreur et il est clair que plus les échéances vont se rapprocher plus devront se diversifier les interventions.
Petite incise, au passage : on apprend en ce début de semaine que l’hebdomadaire Marianne est en cessation de paiement due, nous dit-on, à une baisse du lectorat en kiosque de 8,3 %. Le phénomène ne touche certes pas que cet hebdomadaire. L’Obs, L’Express et, dans une moindre mesure, Le Point, subissent des baisses à peu près du même ordre. Que la direction de Marianne ait en outre perdu son meilleur ennemi, Nicolas Sarkozy, en a probablement rajouté. Que la ligne politique suivie depuis un moment avec un Bruno Dely à la tête de la rédaction et des couv’ moins agressives entrent dans le champ des hypothèses. Enfin, que sur le terrain de l’internet, le journal n’ait à peu près rien fait d’autre que du commentaire à vif, exercice habituellement réservé à la presse quotidienne, n’a sans doute pas aidé. Enfin, que Marianne ne soit pas adossé à un groupe de presse tel celui du Monde, autrement dit soit sans autre ressource que lui-même, est aussi dans le champ des possibles. Il se dit malgré tout que le journal pourrait être sauvé sans que n’arrivent de nouveaux investisseurs…
5. L’enseignement privé a la cote et les démissions d’enseignants du public se multiplient…
L’actualité, c’est aussi cette enquête montrant que l’enseignement privé attire de plus en plus de collégiens. Les bonnes âmes, ministère en tête, expliquent qu’il ne faut en aucun cas y voir la conséquence de la réforme du collège de NVB. La présidente de l’APEL, l’association des parents d’élèves de l’enseignement libre, autrement dit de l’enseignement catholique, le confirme. Elle veut y voir, en effet, non la rançon de la désastreuse réforme du collège mais du fait que l’accueil des parents dans ces établissements y serait infiniment meilleur… La réalité, c’est que si le phénomène n’est pas nouveau et que cette progression en 2015-2016 s’inscrit dans la logique des années précédentes, pour autant et vu ce qu’ont pu être la longue suite de réformes désastreuses qui se sont succédées, toutes ont conduit des familles ayant quelques moyens à s’éloigner d’un enseignement aujourd’hui réduit à une pantomime dans le public. Le « reste à charge » auquel ces parents consentent sert précisément à faire en sorte que l’enseignement privé puisse offrir à leur progéniture ce que l’enseignement public se refuse à leur donner, du latin, par exemple, sans compter l’entre-soi de bon aloi qui fera que la grande difficulté scolaire se concentrera dans l’enseignement public alors que peu de moyens lui sont alloués pour y faire face.
Cette mauvaise nouvelle pour le « vivre ensemble » dont on nous rebat les oreilles se trouve renforcée avec cette autre nouvelle : les démissions d’enseignants stagiaires du public ont triplé depuis 2012 passant de 1 % en 2012-2013 à 3,2 % en 2015-2016. Bien évidemment, et là encore, le ministère minimise le phénomène en expliquant que si cela est vrai, cela se conjugue avec l’arrivée de troupes fraîches ayant préalablement eu une vie professionnelle en dehors de l’enseignement.
Pour qui a vu passer ces dossiers au ministère, on sait combien l’inspection sait être aimable à l’endroit de ces impétrants, en particulier dans les disciplines déficitaires tel les Mathématiques. De vagues études ayant eu vaguement à voir avec la discipline visée suffiront, loin de ce qui peut être exigé des candidats aux concours de recrutement, à commencer par un master dans la discipline et une maîtrise de celle-ci sans commune mesure avec celle que peuvent avoir ces recrutements hors concours dont le ministère se vante...
Que presque 2 000 jeunes préfèrent « lâcher l’affaire » sonne comme un avertissement pour une politique réputée de gauche, autrement dit théoriquement favorable aux enseignants. En fait, sur le terrain, on sait que s’il est vrai que cette gauche a réintroduit la formation des enseignants supprimée par Sarkozy et son ministre Luc Châtel, rien n’a été fait pour rendre cette formation efficiente et attractive. La charge de travail imposée aux stagiaires à qui l’on demande pour beaucoup, la même année, de se former professionnellement et de valider leur master est telle que beaucoup craquent et sortent de là éreintés, essorés et peu préparés à affronter les dures réalités d’un métier rendu toujours plus difficile et de plus en plus mal payé en retour (1,4 SMIC à l’embauche pour un Master !). Et ce n’est pas la qualité de l’encadrement à laquelle ils devront faire face qui rendra les choses plus faciles. Tant les inspecteurs que les chefs d’établissement, se pensant ainsi modernes et branchés, se croient obligés d’appliquer les recettes managériales du privé, le neo-management. Rien n’aura été fait durant ce quinquennat pour redonner aux enseignants ce dont ils ont besoin de leur hiérarchie, protection, compréhension, aide, soutien voire encouragements. La dégradation des conditions de travail et tout particulièrement le poids de la hiérarchie se sont encore accrus ce qui, combinée à la faiblesse des rémunérations contribue, on le sait, au manque d’attractivité de ces professions et à la crise de recrutement qu’elles connaissent aujourd’hui.
6. Nécrologie…
L’actualité, c’est aussi la disparition de certaines figures qui vous ont accompagnées des années voire des décennies durant. Il n’est évidemment pas question ici de répertorier l’ensemble des noms que « la grande faucheuse » a choisi d’emporter en cette fin d’année 2016 mais, comme souvent, la disparition d’un être est l’occasion d’une introspection sur le passé, ce que l’on sait d’eux, ce qu’on en a retenu en bien comme en mal…
Ainsi a-t-on pu, par exemple, être touché par la disparition de Michèle Morgan et revoir et réentendre le célèbre « T’as de beaux yeux, tu sais… » de Jean Gabin à qui elle répondait « Embrasse-moi… ». Et, oui, elle avait de fort beaux yeux qui ont enchanté des générations entières… et, oui, on s’est dit que Gabin était décidément homme bien chanceux… (Pour mémoire, ce grand moment est ici)
Et puis, il est des disparitions qui émeuvent beaucoup moins, pour lesquelles on doit prendre sur soi pour ne pas médire… C’est le cas de celle de François Chérèque, l’ancien secrétaire général de la CFDT, dont il est difficile de ne pas retenir le rôle coupable qu’il joua dans le conflit sur les retraites en 2003. Que Thierry Pech, directeur général de Terra Nova et ancien de la CFDT, Le Monde, les caciques du PS dont, en premier lieu, tous les rocardiens qui le dirigent aujourd’hui, les représentants du patronat, que tout ce monde-là verse des larmes, c’est bien normal. On comprendra néanmoins qu’il puisse se trouver une large fraction des salariés pour n’en verser aucune.
@ suivre…
N.B. : pour ceux et celles que cela intéresse, ils trouveront ici au format mp3 et là en mp4 (vidéo) l’excellente émission qu’a réalisé Arrêt sur Images sur la Sécurité sociale et son histoire, avec comme invités Gilles Perret, le réalisateur de « La Sociale », et Frédéric Pierru, sociologue.
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